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Virtualisation

22/1/2020

 
De quelle vertu parle-t-on ? Virtu, vertu. Racine commune, dit-on. Ce qui dégage des significations intriguantes, de ce fait. Faisons ce constat que le virtuel, loin d'être cantonné aux écrans et plateformes ou jeux-vidéos, s'est immiscé partout, jusque dans nos inconscients. Avec un ami, j'ai beaucoup développé cette transition sous l'angle du langage. Vous pouvez trouver ce livre sur l'Amazonie du net sous le titre Réflexe Virtuel.

Le virtuel est-il une vertu ?

Toujours est-il, Il nous faut vraiment mesurer à quel point nous sommes virtualisés aujourd'hui. Je veux dire, même en dehors du conditionnement par écrans, boutons et lumières. Le virtuel commence avec le langage. Je veux dire, le langage verbal. Des scénarios qui tournent dans nos têtes, on se parle dans nos têtes, avec souvent des éléments qui ne sont pas de nous vraiment, qui viennent d'on ne sait où, comme par exemple de manière radicale, dans les rêves.

Le virtuel remonte à loin donc. Le virtuel permet de spéculer sur des choses, d'imaginer, de se projeter, d’émettre des hypocampes. L'utilité n'est plus à démontrer, ses dangers, plus. On parle d'idéologie par exemple. On va utiliser une analogie informatique, mais oui, c'est comme un programme virtuel appliqué dans le monde, parfois un fait réel qu'on voudrait réduire à un programme aussi. Bref, la frontière est floue et on ne sait plus ce qui est réellement réel de ce qui est réellement virtuel. Sachant qu'en plus le réel n'est pas l'opposé du virtuel. Malokrane ? Ce qui est formidable est qu'en écrivant cela, mais surtout vous en lisant cela, vous pourriez vous dire que ce sont des réflexions perchées, alors que c'est ce qu'il y a de plus basique. En vérité, le simple fait de penser que le réel serait plus simple que la description que je viens de vous faire traduit à quel point nous sommes virtualisé dans nos modes de penser. Pas étonnant, car le verbal est une métaphysique embarquée. On pense n'utiliser que des outils verbaux, alors qu'ils nous transcendent quasi entièrement et profondément. On ne peut pas sortir de cela. Il faut comprendre cela, et jusqu'où ça va. Remontez en vous ce fil. Ce n'est pas un exercice mystique ou intello, c'est la chose la plus basique que l'on puisse faire.

On ne va pas dans le virtuel comme on se rend dans une pièce à part, isolée du reste. On compte souvent sur la contingence de chaque chose, et surtout des spéculations. J'aime beaucoup le terme spéculation car il illustre très bien le virtuel. La spéculation est un investissement qui ne se fait pas dans le vide. Il y a des ressources allouées et escomptées. Puis toute une dynamique, pourrait-on dire écologique. Ce n'est pas "faux", ou "pas réel". Il s'agirait plutôt d'un état particulier, un entre-deux peut-être, ou quelque chose d'approchant. D'ailleurs, le virtuel peut se définir comme une multiplication des intermédiaires. Plus d'écrans par exemple, de manière très matérielle. Mais où ces intermédiaires ne sont pas faux, et ne sont pas isolés, où ces intermédiaires peuvent même devenir entre temps la finalité d'autre chose alors qu'il s'agissait d'un moyen au début. C'est à double sens, à tous les sens, car nous sommes en écologie, tout est intégré, tôt ou tard. Il n'y a pas de "pour du faux". C'est en cela que le divertissement proposant de la violence par exemple n'est pas à encourager, car si voir de la violence ne rend pas violent comme dans l'image, la violence reste là, nous imprègne malgré nous, surtout si on considère que "c'est pour de faux", ou "c'est une fiction". Vous savez, la publicité présente des choses exagérées, on se dit qu'on n'est pas bête et qu'on ne va pas obéir à ce qui nous incite. Mais ce n'est pas comme ça que fonctionne la pub. Ce n'est pas comme ça que fonctionne le virtuel. Le mot qu'on a utilisé dans le livre Réflexe Virtuel est : porosité. L'immersion est progressive, mais extrêmement profonde. Et par essence, la grenouille dans l'eau froide d'une marmite ne se rend pas compte que l'eau devient chaude, ou trop tard.

De la même manière que ce qu'on pense n'est pas contingent à notre mental, à notre petite personne, malgré qu'on ne dise ni n'écrive rien ; ce qu'on regarde, fait, pour nous divertir (romans, BD, séries, JV, cinéma, essais, etc.) n'est pas contingent à son support et à nous. Le virtuel a beau être virtuel, il peut devenir le contexte de base si on ne fait pas gaffe, si on ne saisit pas à quel point la spéculation n'est pas sans conséquence. On ne peut pas faire sans virtuel, mais on peut saisir les limites et les effets du virtuel, pour garder les pieds sur terre. C'est connaitre la différence entre le mot "arbre" et l'arbre individu réel qu'on peut regarder directement avec les yeux. Mais il est clair que nous nous pensons comme des esprits la quasi totalité du temps. On critique parfois l'imagination, ses effets pervers. Le problème étant que l'imagination c'est tout notre mental, tout notre langage, nos perceptions aussi. Dans ce contexte, avec en plus la croissance technologique dite exponentielle, on éprouve toujours davantage de difficulté à distinguer le réel le plus élémentaire, du virtuel. Pas étonnant que nous pensions pour certains pouvoir changer de sexe, puis changer de sexe facilement, puis changer de sexe régulièrement. Certains sont aussi à s'identifier à une espèce différente de l'humain, ce qu'on appelle les "otherkin" (il fallait forcément un anglicisme).

Qui dit spéculation, dit volatilité. Ainsi nos identités et nos modes peuvent varier de plus en plus facilement, et rapidement. On peut passer d'une idéologie à une autre de manière radicale. On peut changer d'identité, de foi, et autre comme de chemise ou presque. Il faut "déconstruire" pas pour plus de vertu, plus de vérité, d'égalité ou autres excuses, mais afin d'être plastique, fluide, flexible. On dit parfois que l'on devient sauvage. En vérité, oui, on devient sauvage parce qu'on "déconstruit", parce qu'on considère toutes nos hypothèses comme des réalités les plus dures, parce qu'on ne comprends pas à quel point nous sommes virtualisés depuis longtemps et à quel point nous le sommes. On pense aussi que le virtuel est un espace isolé, mais on voit de plus en plus le virtuel envahir le réel, il n'y a pas de compartimentation ici. On n'est pas à l'abri du virtuel parce qu'on ne joue à aucun jeu-vidéo, ou ne regarde aucun feuilleton. On a beau savoir qu'une fiction est une fiction, elle nous imprègne et imprègne tout l'environnement tôt ou tard (la seule façon d'être moins atteint est probablement d'étudier au lieu de consommer). Ici nous voyons que la Bible nous enseigne des choses vitales sur le langage verbal, sur notre condition, sur le virtuel, sur la non-contingence de nos pensées, paroles, actions, et même de toute notre existence. Certains pourraient se demander en quoi une pensée pourrait faire du mal à autrui (et à soi aussi donc). Comme si un pensée venait de nulle part, et n'allait nulle part. La croyance en la contingence résiste à tout a priori. Bref, il ne serait pas étonnant qu'on assiste à toujours plus de changement d'identité, de fluidité, dans des proportions et formes que nous avons du mal à imaginer aujourd'hui. Plasticité. Jusqu'au gaz. Même dans l'économie, une grande part de nos activités économiques est totalement virtuelle, voire totalement spéculative dans le sens négatif. Mais nous ne pouvons pas faire autrement que de continuer. Le virtuel n'est pas sans conséquence. On a bien pu voir des épidémies dans un jeu vidéo. Il faut se préparer à probablement vivre de plus en plus en ces entre deux troubles.
Réflexe Virtuel
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art >>> critique + prospective

20/9/2018

 

ça pas art ?

Poser une critique de l'art au sens large. Souvent je suis exaspéré d'entendre des gens critiquer l'art, sous-entendant ou clamant clairement que l'art "ne sert a rien", est futile. Il est possible que beaucoup de ces détracteurs sans détour soient étrangers à l'art, ou en tout cas aux formes d'art qu'ils identifient comme étant de l'art. Question de perception. On va identifier uniquement certaines choses dans une catégorie et en exclure la majeure partie restante. Ainsi parler avec éloquence ne sera pas perçu comme un art hormis dans un contexte spécifique comme un seul-en-scène humoristique ou une émission de télé ou un intellectuel ou un politique. Mais si il s'agit de bien s'exprimer au quotidien alors ce ne sera pas perçu comme art. Perception est souvent comme un ensemble de labels. Il faut un ensemble de critères et parfois seulement un critère spécifique pour faire toute la différence. Une certaine blague raffinée sur scène devant un public déjà chaud et conditionné pour être réceptif sera peut être de l'art, mais la même blague même mieux racontée dans une conversation ordinaire sans contexte de spectacle ne sera vraisemblablement pas perçue comme art. Il y a quelque chose de démonstratif obligatoire, un emballage qui fait que x sera ou non classé dans nos têtes comme art. C'est-à-dire qu'avant même le contenu il y a un paquet de filtres qui élimine avant toute émission/perception la capacité d'attention qu'on peut accorder et donc qui dit attention dit valeur souvent (monétaire).

Partout ! et... nulle part ?

Aujourd'hui on n'a jamais autant créé d'art, avec une telle diversité, un tel volume et fréquence. Et ça n'a jamais été aussi abordable. A vrai dire notre communication quotidienne se pare d'art a notre insu a travers des formules poétiques ordinaires, des photos cadrées et retouchées, des musiques, des vidéos, etc. Mais si la communication est quasi instantanée la gratification par ses pairs est elle très inégale pour l'instant. Cela est due aux modalités des plateformes. Les plateformes sont des proto-routes très chaotiques encore à ce jour. Mais cela est aussi dû à nos capacités limitées d'attention et de traitement de l'information, puis avant ça aussi de notre cerveau. 

Source et véhicule

Maintenant après cette sorte de célébration de l'art actuel il convient de nuancer. C'est même le topo motivant cet article à la base. Il est vrai que beaucoup de notre production est le fruit de "désordres" physiques et psychiques et spirituels ("désordres" qui ne sont peut être qu'un ordre qu'on a du mal voire qu'on ne peut pas reconnaitre). Il est vrai aussi que beaucoup de notre production peut se faire par défaut d'autre chose, d'autres possibilités de production et d'interaction, d'échange, de travail, de don.

Mais dire cela n’équivaut pas à pathologiser tout l'art, car comme il a été dit l'art est partout. Et on pourrait avec cette logique pathologiser l'économie aussi et toute forme d'activité, y compris la parole. Donc attention à ne pas tomber dans ces erreurs de logique. Néanmoins il est évident qu'en créant ces productions on véhicule aussi des malaises, des pathologies. Ça peut être évident pour certains artistes où on identifie très facilement leur malaise. A vrai dire même chez beaucoup de grands maîtres peintres ou écrivains par exemple on peut voir un côté pervers de voyeur sur la souffrance des auteurs. Certains individus aiment peut être collectionner des œuvres pour contempler à quel point ils sont éloignés de ces états troubles. Il y a aussi une sorte d'exhibitionnisme dans l'art souvent, mais encore une fois ce n'est pas spécifique à l'art, mais à tous les domaines de notre existence, c'est probablement notre conditionnement biologique qui veut ça. J'insiste sur le fait que tout pathologiser n'est pas honnête non plus, mais a l'inverse dire que tout est normal n'est pas honnête non plus.

états internes à la loupe

Dans l'expérience de tout art il peut y avoir une sublimation interne, on est subjugué ou touché et ce rapidement. Mais tout ne se réduit pas à l'effet court terme immédiat. Peut être que cette sublimation véhicule ensuite en nous le malaise de l'auteur. Je perçois ça de façon évidente quand j'écoute certaines chansons pop. J'adore sur le coup écouter, parfois même en boucle, c'est entraînant, c'est stimulant, et plaisant. Mais s'en suit parfois/souvent un vide, et un malaise, une anxiété. C'est comme du sucre finalement. Il convient donc je pense en tant qu'artiste ou producteur de contenu de toute sorte d'être prudent, il nous faut analyser nos états internes, et essayer de ne pas véhiculer de mauvaises choses à notre insu. Une sorte d'éthique, de responsabilité. Ce qui me fait tiquer en écrivant cela est que souvent il y a production pour compenser, ou pour se défendre d'agression autres. Exemple de l'agression économique qui nous pousse à produire, et si on ne peut produire via des circuits identifiés comme étant du "travail" ou de l'économie alors on va plus produire des formes artistiques et ou sportives par exemple. Le problème est que ça se fait par défaut, ce qui déprécie d'une certaine façon les modalités et la pertinence de l'art vie une simple occupation de réserve. Il y a aussi cette idée où on ferait une thérapie par l'art. Oui peut être en partie parfois, mais encore une fois ce n'est pas spécifique à l'art. Travailler dans les conceptions actuelles du travail est aussi une thérapie à ce moment là, et même nos relations sociales sont des thérapies alors. 

éthique du don

Ce qu'il y a aussi avec nos outils de communication actuels est qu'on n'a pas le contexte du récepteur et donc on a peu de visibilité sur comment ça sera reçu perçu. A vrai dire, ces décalages d'ancrage de tous les éléments que l'on produit tous concerne tous les aspects de notre vie. Quantité d'innovations et d'apports intelligents, pertinents, concrets ne sont pas pris en compte dans l'immédiateté de l'émission/production, mais leurs effets se produiront qu'on le veuille ou non. Pour y voir plus clair, je vous encourage à lire différents article sur ce blog qui parlent du progrès surtout mais aussi de l'économie. Bref, pour en revenir à nos moutons, toute éthique qui censurerait la production et le partage pourrait finalement être très limitée dans ses effets. Bien que faire ce constat n'indique pas qu'il faille s'abstraire pour autant de toute éthique, juste peut être qu'on aurait tendance à surestimer les effets éthiques réels d'une l'éthique formelle. Ce n'est donc pas une éthique mais peut être que prendre plus de temps pour construire chaque œuvre serait une bonne option, si par exemple nous voyons une œuvre comme une construction pérenne et non comme seulement une expression passagère. Ce n'est pas être mégalo que de vouloir donner quelque chose de consistant, l'idée reçue souvent véhiculée à ce propos est qu'on produirait pour épater des générations, faire de l'ombre aux autres, mais non ! Déjà qu'importe le domaine où l'on œuvre, on ne peut pas ne rien produire. Ensuite on peut travailler beaucoup plus les fondations, les structures et chaque détail et bien intégrer le tout en une cohérence qui peut apporter quelque chose à soi et à autrui. 

En cours forest

J'attends donc avec impatience :)! des moyens pour mieux apprécier les productions actuelles et en cours, mais surtout des productions futures qui probablement j'imagine ne seront pas ou beaucoup moins issue de troubles physiques, psychiques et spirituels, et avec un raffinement beaucoup plus élevé qui nous permettra de communiquer et comprendre des choses beaucoup plus profondes et bouleversantes dans nos existences et sur l'univers en général. Car c'est cela le rôle de nos productions dont art, de nous donner des angles et des bases de communication pour demain, donc de compréhension. Le langage verbal même est une agrégation de procédés de style, artistique donc combiné à l'effet du temps et sculpté par les nécessités de précision, de concision etc. Il ne faut pas croire, on peut souvent tomber dans un jugement où les productions culturelles passées seraient meilleures que les présentes. Mais cela est incomparable en terme de qualité car ces productions sont relatives à des époques donc modalités de production et de perception différentes. Aujourd'hui on bénéficie d'une diversité et d'un niveau de précision/raffinement jamais atteint dans tous les domaines, mais on n'a pas les moyens d'apprécier à leur juste valeur car nos perceptions sont plus lentes à évoluer que nos productions. Aussi nous avons beaucoup d'informations, énormément au quotidien, et donc il y a un phénomène de saturation rapide qui nous met en mode évitement peut-être, qui nous blase. Aussi il y a tellement de domaines en expansion en simultané et accessibles qu'on se sent plus petit et perdu dans cette abondance croissante ! Mais l'éthique de la production implique une concentration, on doit se concentrer sur ce qu'on veut apporter et cibler donc. Et savourer ce que chacun apporte aussi et ce qui nous touche. Car l'art au sens large ne se limite pas aux stars et aux musées mais à des communications à travers le temps et les époques, qui passent au delà du support.
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De l'intelligence

14/7/2018

 
Le terme intelligence me semble mauvais car souvent employé à mauvais escient, et ce depuis longtemps et dans quasiment tous les domaines de la connaissance humaine. 

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La distinction par les capacités

À intelligence donc je propose dans cet article le terme de capacité. D'un côté il y a les capacités en acte qui alors caractérisent tout le vivant et même le non-vivant. C'est le côté purement mécanique de toute chose, mécanique donc au premier degré. C'est à dire que dans cette perspective le vivant de type biologique n'a pas le monopole des capacités, loin de là. La capacité est un ensemble de réactions à des processus. Donc même une grosse pierre qui dégringole du sommet de la montagne à des capacités en roulant et écrasant, emportant et modifiant d'autres éléments avec elle le temps de son parcours. Donc des éléments qu'on place dans les catégories/qualificatifs de minéral et d'inerte peuvent présenter des capacités. Cela paraît absurde à priori dans notre contexte de pensée actuel mais on pourrait admirer que cette grosse pierre emprunte un creux de vallée plutôt que de faire l'effort de passer à travers tout. En suivant un creux, la pierre manifesterait une certaine capacité à réagir avec efficience dans son intérêt/objectif de descente de montage. Mais si la pierre passe à travers tout, ne suit aucun creux, aucun chemin mais en creuse un nouveau, on pourrait aussi admirer ses capacités de création, d'effort, d'initiative. D'autres pierres pourront suivre ce chemin. Donc dans cet exemple qui paraît absurde on voit qu'on peut aboutir à trouver "intelligent" un élément solide isolé non-vivant et appartenant aux minéraux. Ce qui nous paraît plutôt contre-intuitif voire insensé, mais qu'on ne peut pas vraiment réfuter à priori. Tout ce raisonnement nous renvoie à des jugements ordinaires qui nous surviennent alors comme inconsistants, comme le classement intra-humain de l'intelligence ; mais aussi le classement d'intelligence en plaçant l'humain au dessus des autres formes du vivant dont animaux, végétaux et mycètes parmi les macro-organismes ; mais aussi le classement du biologique organique en plus intelligent que le non-biologique.

T'as un beau potentiel, tu sais

Maintenant si on prend le terme "capacité" non pas en acte mais en tant que potentiel. Le potentiel c'est, pour reprendre l'exemple, la grosse pierre qui peut dégringoler, c'est à dire elle en a le pouvoir avant même de le réaliser en acte. En potentiel donc. Il s'agit d'un terme qu'on utilise souvent notamment dans l'éducation et l'économie : "tu as un potentiel énorme, exploite-le!". Mais non la grosse pierre de granit préfère laisser des capacités en potentiel. L'exemple est plutôt amusant parce qu'un éboulement serait vu comme la manifestation d'une intelligence, plus précisément l'intelligence de la grosse pierre de granit. Or il est rare qu'on puisse se dire en voyant du granit qu'il est intelligent, au mieux c'est beau et dense. Donc tout ce qui existe actuellement selon nos perceptions actuelles est une ressource, et toute ressource est un ensemble de capacités, càd une forme d'intelligence.
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Le bois travail

Arrivé ici se pose beaucoup de questions. Un bout de bois en plein soleil peut produire un son en craquant, se dilatant, ce qui pourrait être attribué à une parole. Lol d'ailleurs l'expression veut que le bois "travail" (alors que l'arbre est sensé ne pas être intelligent et qu'en plus sa partie récupérée pour faire un plancher est supposée morte). Nous même nous parlons souvent sans savoir ce qu'est la parole, sans savoir pourquoi, mais nous parlons. Qu'est-ce qui distingue l'un de l'autre ? Cette question n'est pas pertinente en fait, surtout pour traiter l'intelligence, et tient plus de la défense d'une singularité spécifiquement humaine, ce qu'on appellerait ego parfois. On peut trouver des yeux plus performants que ceux de l'humain dans tout le vivant actuel, mais cela ne veut pas dire que les yeux des humains ne valent rien. Bien sûr les yeux humains sont quelque part uniques et spécifiques, mais ils ne sont pas les seuls formes de vie à bénéficier de ces organes de perception, et encore moins les plus performants. Ah profitons ici de ce concept de performance. La performance, par exemple d'un organe/membre, ne fait pas systématiquement son utilité. On se demande par exemple si les yeux des huitres qui peuvent voir très loin dans le ciel leur servent à comprendre ou expérimenter quelque chose de fondamentale dans leur existence. On se demande aussi à quel point ça ne leur sert à rien si elles voulaient éventuellement échapper aux papilles des humains et autres formes de vie qui pourrait s'en nourrir. À travers donc les exemples de la grosse pierre de granit et des yeux de l'huître on voit que l'intelligence est extrêmement relative, et que nos conceptions actuelles à cet égard semblent soudainement très étriquées, pour ne pas dire totalement ridicules. Ces raisonnements peuvent paraître un brin vains mais ils ont des implications extrêmement profondes... que je laisse macérer à votre goût.

Ia ou ia pas ?

Il s'agit ici d'une démarche venant en réaction à tous ces débats sur la fameuse "IA". Ce qui me fait sourire c'est qu'on attend d'une machine/algorithme/programme qu'elle reproduise juste des représentations purement humaines pour qu'on puisse décider qu'elle est intelligente. C'est à dire qu'on corrèle reproduction formelle avec intelligence, représentations et intelligence et enfin comble du pompon que la machine se calque sur les critères uniquement humains. L'intelligence humaine n'est ni unique, ni un modèle ultime. Admettons qu'on isole l'intelligence humaine de tout son environnement (dont l'humain est une partie de l'environnement), il apparaît une grande différence d'intelligence entre le mathématicien et le sprinter. Ici dans notre paradigme on opterait pour dire que le mathématicien correspond plus à l'intelligence que le sprinter, ce qui est faux, car chacun est intelligent dans son domaine, et si on persiste à dire que le mathématicien est plus intelligent alors cela implique de faire un classement vertical des domaines de l'existant/existence.

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Source image : http://designbeep.com/2010/05/10/40-truly-creative-examples-of-manipulated-robotic-animals/

Verbe en course à pied

Est-ce que les maths sont supérieurs aux déplacements rapides à pied ? La comparaison est absurde. Cependant dans notre paradigme même le sprinter pourrait être tenté de reconnaître que le mathématicien est plus intelligent car notre paradigme corrèle les capacités logico-mathématiques avec l'intelligence. Les capacités verbales aussi sont très prisées dans notre conception ordinaire de l'intelligence. En fait on est dans une phase sociale où encore ces domaines de l'intelligence sont dominants, les mesures de QI par exemple mesurent des instantanés de ces deux domaines en priorité sur toutes les autres formes d'intelligence. À titre personnel j'ai une approche spéciale de ce sujet. Pour moi, les nombres font partie du verbal. Et ce média verbal est extrêmement côté encore. Or le verbal pourrait tout à fait être vu comme une simulation, un espace de simulation. Mais attention ici marcher dans la rue implique aussi des simulations abstraites, donc ce côté simulation n'est pas uniquement relatif au média verbal. Bref, donc on attend pour reconnaître officiellement et par la majorité qu'une machine soit "intelligente" qu'elle soit  purement individuelle, qu'elle soit parfaitement isolée en local, qu'elle reproduise des mécanismes représentatifs des critères du paradigme actuel de l'intelligence selon l'humanité, qu'elle fasse la démonstration perceptible par l'humain qu'elle a des capacités et qu'elle les use à but démonstratif. Hum, je pourrais certainement ajouter des critères sur ce qu'on attend mais je trouve que ça fait suffisamment de remises en cause vertigineuses déjà ainsi.
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Manutention
locomotion
migration

Une belle part de ce qu'on appelle intelligence correspond donc à une manutention mentale/informationnelle. C'est à dire que ce phénomène s'inscrit dans une migration  globale de l'existence en état d'information, c'est à dire une existence dépendant moins d'un déterminisme uniquement biologique initial. Certains experts dans l'intelligence, la cognition tout ça disent que l'intelligence provient directement de notre locomotion. Et je suis parfaitement d'accord avec cela, j'en avais fait un article d'ailleurs. Cependant je place dans "intelligence" aussi toute forme d'émotion, que je n'oppose aucunement avec les gros bras des matheux, des verbeux de la scène politique. Alors oui, l'intelligence semble de plus en plus migrer vers de l'information pure, mais cela ne veut pas dire que le physique ne tient plus guère de l'intelligence, et que le purement informationnel concernerait uniquement la gestion d'abstractions "rationnelles". Car aujourd'hui quand on parle d'intelligence on exhibe souvent ces capacités logico-matho-verbales comme des gros muscles dont on est fier mais qui ne servent pas forcément à une application pratique hors identitaire/psy. Et l'erreur commune est de penser que ce qu'on classe dans l'émotion est opposé à l'objectivité ou la rationalité. Je dirais plutôt que l'émotion pourrait être une forme de rationalité qu'on n'a pas réussit à bien intégrer dans notre paradigme formel de la rigueur méthodologique et existentielle.

tête à tête sage

Enfin, on corrèle intelligence et une sorte de sagesse, c'est à dire une utilisation/application mesurée des capacités. La question est : "mesurée" à partir de quoi, qui, quels critères ? Je vous renvoie à un article sur la sagesse disponible sur ce blog. Et bien sur, on a toujours cet encéphalocentrisme qui corrèle quasi uniquement l'intelligence à un organe isolé. On veut identifier telle zone avec telle capacité, et autre en négation de l'intégrité du corps tout entier, notamment avec les études sur le "deuxième cerveau", en négation aussi de l'interactivité c'est à dire que nous ne sommes pas qu'un cerveau, ni même que les limites de notre corps par la peau, nous avons une identité intégrée à notre environnement et dynamique, composée de personnes, d'objets, de rythmes.
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LE Progrès en question

15/5/2018

 
Pro-grès, et pourquoi pas pro-silice ? Lol ok mauvaise blague, mea culpa maxima.

Paye ta maison

Ce qu'on appelle progrès est une notion un peu vague, dont certains diront qu'elle est "protéiforme". Oui, ce n'est pas parce qu'on a un seul mot pour désigner le phénomène que le progrès est derrière unitaire et bien distinct. Le progrès peut faire référence à beaucoup de phénomènes différents. Aujourd'hui on en a une vision que je qualifierais d'assez fixiste. Le progrès serait une accumulation bien acquise. Sur la base de cette conception, on s'imagine alors une accumulation presque parfaite et prévisible. Exemple, je construis une maison, cette maison est la mienne, elle est acquise et donc je peux créer d'autres progrès à partir de cette acquisition. Mais, en fait, la maison est "naturelle" et donc sujet à des modifications permanentes, certaines voulues, d'autres imprévues (dont entropie). Et oui, acheter une maison, c'est aussi le prix de l'entretien (et des aléas) sur la longue, pas seulement le prix d'achat et le prix de construction. Et donc on peut appliquer ces réalités bien concrètes à tout ce qu'on parque à va-vite dans le carton "progrès". Ainsi, tout ce qu'on fait, produit, échange ne s'accumule pas parfaitement un à un dans des bénéfices localisés (aka l'individu, le  groupe, la région, etc.). Il y a des couts après coût. En fait, je pense qu'il n'y a pas un moment où il n'y a aucun cout. Mais tout peindre en terme de coût me semble pas pertinent et en plus potentiellement angoissant. Mince, ça me coute combien de respirations d'écrire ça ? Et combien de battement de paupière ? Et en joules, ça fait combien ? Lol.

Pas linéaire ?

Donc, quand on met en place une "avancée" -que ce soit sous forme de biens, d'infrastructures, de connaissances, de savoir-faire, et autres- il n'y a pas d'accumulation linéaire comme 1+1. Sur l'exemple pris au dessus, si je construis une maison, puis deux, on ne peut pas dire que le progrès c'est 1+1 = 2 (maisons), donc on serait passé de 0 à 2 de manière définitive... Mais non, ça ne fonctionne pas ainsi. Déjà parce qu'on ne part jamais de 0, on fait un réagencement de ce qui existe déjà. Et comment comptabiliser la maison (potentielle) en des matériaux éparses ? Cependant, il est vrai que 100 planches de bois sont plus "efficaces" assemblées sous forme de toit qu'empilées en vrac dans un entrepôt. Alors, le progrès se situe où exactement ? Dans les planches de bois, dans l'agencement et le temps d'agencement, dans la réalisation finie de la maison ? Difficile à dire, car le phénomène est diffus et dynamique. Deuxième point contre l'idée de progrès linéaire, ces 2 maisons peuvent être un plus certain par rapport à dormir sans abris ou sans "modulation climatique micro-locale". Mais le maintient de ces maisons a un coût, ça se dégrade, ça ne correspond plus aux besoins initiaux, il faut améliorer l'isolation rapport aux nouvelles avancées techniques et normes, améliorer la distribution d'eau, etc. Donc il y a un coût pour maintenir, et comme on ne peut pas ou peu maintenir (en cause la "vitesse") avec les mêmes et exactes techniques on a probablement un surcoût de maintenance. Donc ce +1 doit être totalement amoindrit en terme de coût/bénéfice pour l'individu.

Chaines causales

Néanmoins, si le progrès n'est pas aussi linéaire qu'on se le figure spontanément, peut-on dire alors que le progrès n'existe pas ? Appelons à la barre la notion de mathématique : l'exponentiel. L'exponentiel est une augmentation dite aussi "géométrique" (donc pas arithmétique). On a donc l'idée très graphique (représentation visuelle abstraite et simplifiée pour décrire une "dynamique") de croissance lente, puis accélérante. Comme le disent certains auteurs-stars, ce type d'augmentation est loin d'être intuitive pour l'immense majorité. Ce qu'on a du mal à saisir donc c'est à quel point les progrès un à un sont un phénomène diffus. Effectivement, sur le court terme, il y a semble-t-il souvent plus de coûts que de bénéfices, et donc on peut moquer certains éléments, certains projets, certaines inventions, certains actes et même certaines croyances. Mais c'est qu'on prend tout cela sous l'angle trop localisé dans notre perspective limitée (en terme temporel et individuel). On néglige l'impact de technologies "abandonnées" sur le long terme. On néglige la récupération non linéaire de toute création et forme de connaissance. Non linéaire, veut dire aussi non linéaire dans le temps. L'ensemble des chaines causales n'est pas aussi prévisible et plat. On voit la causalité de manière très simpliste souvent, genre un à un en local. Mais comme on l'a vu il ne s'agit pas d'addition d'unités entières.

sur-estimation & sous-estimation

Si l'on devait comptabiliser le progrès - et je suis sceptique sur le tout chiffre - il faudrait plus raisonner en terme d'accumulation de marges, ou marginalités. Si construire une maison ne me donne finalement qu'un progrès de 0,01 (relatif à ma personne seulement) il est possible que ce 0,01 aussi petit et ridicule soit-il, me permette de faire un plus gros progrès dans un autre domaine et alors, si on souhaite faire un calcul, ces 0,01 sont à additionner aux 0,20. Mais c'est encore plus complexe que ça parce que ce minus 0,01 représente peut être un 0,80 pour d'autres personnes. Et donc l'impact réel de ce petit progrès est difficilement traçable. En tout cas on ne peut pas le circonscrire au local 0,01. Et peut être que ce 0,01 sera d'impact nul ou négatif pendant 20 ans et explosera ensuite son potentiel en progrès pour amener le compteur à 30,00. C'est ce qu'on appelle dans le jargon la disruption. Ce n'est pas quelque chose de fou, c'est même un phénomène qu'on peut tous facilement expérimenter à notre niveau individuel. La lecture et l'apprentissage se font beaucoup ainsi. Bon, passons les calculs illustratifs. Ce que je veux mettre en avant ici est qu'il y a bien une accumulation, même si sur le court terme on la sur-estime souvent en rapidité et en effet. Cette sur-estimation conduit parfois à abandonner toute idée de réel progrès, en réaction à cette déception court terme. Mais, on a beau être déçu (pas de voiture volante), la dynamique de fond continue.

critique de l'exponentiel

Maintenant, soyons critique à l'égard de cet exponentiel. Il s'agit d'une représentation en chiffre et en graphique, et donc ce n'est pas le phénomène en lui même mais un espèce de doublon pour faciliter parfois notre compréhension des phénomènes. Cet exponentiel est une idée quasi uniquement indexée sur les capacités informatiques notamment des processeurs (loi de Moore, tout ça). Sans négliger l'importance de ce facteur d'ingénierie spécifique, qui serait lui aussi à nuancer, je pense que c'est un peu étroit. L'idée d'exponentiel nous fait aussi penser à un phénomène presque lisse, alors que nous devons prendre en compte la variabilité d'une quantité de facteurs inimaginable. Je comprends que selon la méthode ces innombrables facteurs peuvent être perçus comme du bruit et qu'il faille se concentrer sur ce qui est plus stable à travers ce champs dense de phénomènes intriqués. Mais je considère que ce qu'on relègue dans la catégorie "bruit" peut parfaitement être un contenu qu'on ne sait pas "décoder" sur le moment, et qui donc est tout aussi important que le facteur mis en numéro 1. C'est que l'idée de progrès est parfois trop corrélée et indexée sur le "matériel" et sur l'informatique et aussi sur l'économisme. Par exemple, l'idée de croissance économique n'est pas un indicateur total du progrès, en partie oui, peut être, mais ce n'est pas l'unique indicateur, ni le plus fiable, ni le plus pertinent. D'ailleurs, si au plus la "croissance" économique tend à ralentir c'est bien que cela traduit l'idée que ce que mesure les comptes monétaires de l'économie est largement tronqué. Mais cela a rapport à ce qu'on valorise en priorité selon l'époque...

Et à échelle humaine ?

Ce qui n'est pas pris en compte aussi est comment ce "progrès" se traduit au quotidien, à l'échelle humaine. Parce que effectivement, on augmente la quantité d'information et donc le sentiment de bruit et donc de stress (au début), donc de "perte" de sens, et aussi on augmente l'exposition aux faits négatifs sur lesquels on peut rester focalisé. Il y a également par le progrès matériel et technique, un phénomène de rétroaction. Peut être la conscience agrandie qui fait que de plus en plus de choses nous paraissent insurmontables. Il est possible qu'on surestime des catastrophes potentielles. C'est notre sensibilité qui augmente drastiquement. Sensibilité à la violence, à l'inégalité, aux conditions, etc. Et donc le progrès est moins ou plus un progrès en certains point dans le ressenti et le vécu, malgré qu'on vive en moyenne mieux que des rois d'il y a quelques siècles. Alors oui techniquement on sait faire pas mal de chose et c'est pas finit, mais il y a un coût en terme de sensibilité qui fait que ce progrès ne peut pas être célébré unanimement. Néanmoins, non sans une certaine ironie, cette sensibilité accrue est aussi un progrès et fait partie intégrante du progrès général. Si d'ailleurs on déplace nos préoccupations et nos actuelles priorités progressivement du tout matériel vers du plus émotionnel, plus spirituel, plus humain, c'est entièrement le phénomène de progrès, sa prolongation, sa mutation. Parce que, quelque part, ce qu'on range derrière les mots "morale" et "conscience" et "émotion" sont des phénomènes moins matériels et plus virtuels que de vouloir construire 2000 machines à laver.

LE travail de la nature

Maintenant, on doit invoquer le constat qu'au plus une société humaine prospère au plus ce qu'on appelle l'environnement en pâtit. Alors, il y a la notion d'anthropocène par exemple, où l'humanité serait devenue une force majeure de la nature, de transformation de la nature. C'est souvent à partir de cette perspective qu'on critique toute forme de progrès ou d'enthousiasme envers différents progrès. On part de ce constat et on dit qu'on ne fait que ponctionner la "nature" et que donc on puise dans ses réserves par notamment les énergies "fossiles". Et effectivement, le pétrole et le charbon ne se forment pas en trois jours, il a fallu des échelles temporelles immenses pour arriver à ces matériaux. Ce n'est donc pas une richesse humainement renouvelable. Et en brulant du pétrole pour alimenter un bus on bénéficie d'un "travail" de la nature immense et qui est utilisé, brulé définitivement en quelques instants seulement. On reviendra sur cette notion de temps. Nous sommes ici dans la logique de l'extraction. L'extraction seule est peu pertinente, il faut trouver des usages spécifiques, puis aussi moduler et contracter ou optimiser selon certains critères les usages et les modes d'extraction. Si à partir d'une même quantité de matériaux on réussi à faire plus qu'auparavant, on dilate ce temps et cette énergie.

Démultiplication stratégique

Dans le processus de progrès il est souvent fait mention de la notion d'innovation. Par exemple, pour enregistrer et stocker la musique on a eu différents procédés et ces procédés ont parfois tendance à être, sous l'effet de la découverte, appliqués partout massivement, en détruisant au passage l'hégémonie d'un ancien support technique. Et donc, dans ces découvertes, il y a des processus d'emballement qui sortent de toute mesure et d'optimisation réelle des ressources (bien que peu définissable a priori). Par exemple, le vinyle, la K7, le CD, le MP3, etc. Mais en fait, dans ces processus d'emballement, on ne détruit pas les techniques anciennes définitivement (ou alors rarement) on les conserve et en fait il n'y a pas tellement de remplacement total. Ce qui aboutit à ce qu'on réalise dans le temps une collection de techniques qui restent toujours valables pour certains domaines dans le futur. Pensez ça en terme de bibliothèque de techniques et de boucles. Pesons la nuance de ce phénomène. Une innovation peut permettre de faire des "économies" énergétiques par exemple par rapport à la technologie majoritairement utilisée, mais ces économies seraient vraiment valables parfois si on remplaçait tout immédiatement. Or, ce n'est pas possible, il y a quantité de rigidités matérielles et humaines qui fait que nous ne pouvons pas effectuer ce changement de manière radicale et universelle. Et même ce changement radical ne serait pas forcément optimal non plus car engendrerait des coûts humains et environnementaux assez copieux. Et certainement fragiliserait l'ensemble car il est possible qu'on découvre des failles plus tard. Pour toutes ces raisons, on collectionne des techniques, comme on met ses œufs PAS dans le même panier. Parce qu'on ne sait pas à l'avance quelle prochaine technique sera la plus favorisée/favorable.

Méthodes bouleversées

Ici, petit détour. Par rapport au self-génératif, si on vit longtemps voir très longtemps ou éternellement en nos conditions, on a moins besoin de passer par du standard, donc effectivement on s'éloigne des "normes" ou habitudes sociales pour aller vers plus d'exploration en soi par soi, pour soi, mais aussi plus de plasticité à comprendre ce qui ne tient pas du standard, donc on n'a plus ou moins à utiliser le standard pour le standard afin juste de maintenir cette technique/média.

Il y a donc des conséquences sur ce qu'on appelle la science, ou la démarche scientifique, parce qu'elle est basée encore en majorité aujourd'hui sur ces standards formels de transmission, et du jugement formel de pair à pair (=politique). La science risque donc non pas de disparaitre mais de s'éclater en chaque personne, ou petits groupes, où de nouvelles méthodes plus libres, plus proches de chacun.

On corrèle aussi fortement la science avec le progrès et je pense que c'est un tort. D'abord la science est une explication filée de phénomènes isolés. Elle ne fait donc que traduire la réalité selon ses propres perceptions qui sont aussi un peu ses besoins au passage. Elle crée donc une injection informationnelle d'ampleur, mais ce n'est pas la seule à faire ça. Je considère que tout ce qu'on range dans la catégorie "art" est tout autant une science, les médias sont différents et les démarches moins standards. Ensuite, la science est l'observation, mais l'observation humaine est limitée, donc ses plus grandes "avancées" sont dues non pas directement par sa méthode même, mais par le développement des supports de technologie. La physique et l'astronomie sans télescopes et sans super calculateurs ne "valent" pas grand chose. Mais qu'est-ce que la "technologie" ? Une extension de nous, en perception et aussi donc en actions. A-t-on besoin de savoir fabriquer un smartphone pour bien l'utiliser ? Non. De même qu'on a pas besoin de savoir construire des canalisations pour prendre sa douche, ou planter des patates pour savoir les cuisiner au mieux. Et chaque outils est évolutif, et ne gardera probablement jamais sa fonction initiale à jamais. Ça s'appelle la variabilité et surtout la créativité comme je l'expliquais dans la Triméta. C'est donc quelque chose de très pratique, pragmatique, de terrain et la science n'a pas le monopole. De plus, cette focalisation des espérances sur la démarche scientifique risque de créer beaucoup de déceptions. Par exemple, dans le bio-hacking qui risque de se développer de manière folle, sans qu'on labellise forcément cela en "bio-hacking" (mot un peu ringard), ce sera chaque individu qui va expérimenter pour lui-même avec ses propres informations sur lui-même (bien qu'il y aura aussi des partages évidemment). Mais l'expérimentation gagnera en potentiel de succès si cela est fait de manière spontanée par les possibilités technologiques. Comme je l'écrivais donc dans un article sur la critique du verbal, on va devoir reconnaitre qu'on s'oriente vers un élargissement des médias, et pas que du verbal. Donc le progrès se fait et d'autant plus se fera par l'ensemble des médias, donc ça pourra être la possibilité de créer son environnement dont maison, aliments, vêtements, univers, etc. Ce qui est un peu méprisé encore par la démarche scientifique et reléguant la mode et tout ce qui est bien "humain" à de la "culture", ou de la "distraction", des "lubies" mignonnes. Mais non, les perspectives vont changer, être probablement plus équilibrées dans l'ensemble de la valorisation en société.

morale, conscience, etc.

Le progrès morale ? Paralysie par conscience. Conscience = majoritairement rétro-action, rétro-information, distance de soi. Le psychologisme a pondu le terme de méta-cognition, ce qui selon moi désigne en fait une partie de ce qu'on appelle conscience. On pourrait trouver le terme lucidité, ou clairvoyance.

Traduction

Toujours surpris de l'opposition à l'innovation ou au progrès, avec une vision très fixiste de ce que devrait être la vie, comment on devrait vivre, etc. Alors il est indéniable que le progrès est en fait une traduction globale, une méta-traduction matériel. Et que donc dans toute traduction, on tronque une partie, et c'est possible que parfois ce soit la partie la plus "précieuse" à nos yeux, et que donc on regrette d'avoir tenté de traduire, car le processus est parfois quasi définitif. Ce genre de traduction n'est pas toujours planifiée à grande échelle comme on voudrait le croire (complot), mais reste spontanée car nous ne sommes pas séparé de la nature, nous sommes nous-mêmes un agent de la nature, même si par la conscience on peut un peu moduler sur le long terme cumulatif (exponentiel).

Coût et dépendance

Donc oui, ce qu'on appelle technologie est couteux de bien des façons, aujourd'hui on a le spectre de fin du monde (oui encore lui, depuis le temps qu'on nous le promet) avec le réchauffement climatique qui est de notre "faute". Oui, les technologies sont si complexes que très peu de personnes sont capables de les concevoir, et à vrai dire aucune personne n'est à priori capable de créer un smartphone à elle toute seule. Mais ces concepts de dépendances et de fautes ne sont pas tout à fait correctes, ni honnêtes. A ce moment là, on est dépendant de la terre, on est dépendant des légumes, on est dépendant du sable, on est dépendant des forêts, on est dépendant de l'humanité. Qu'est-ce qui ne tient pas de la dépendance ? Et le terme de faute est de considérer que nous sommes tous conscients et parfaitement au courant de tous les éléments et surtout du futur. Connait-on le futur ? Non, sinon ce ne serait plus le futur, plus vraiment.

oubliés, de retour sur la scène

Le temps, le futur est parfois déjà passé. Il y a des innovations sous formes matérielles ou informationnelles qui sont venues trop tôt pour être exploitées, vues à leur juste potentiel. Et elles se sont perdues dans le flot. Mais parfois elles refont surface d'un coup des années plus tard. Le temps non plus n'est pas uniquement linéaire. Il y a une expression : il a eu tort d'avoir raison trop tôt. C'est fort valable pour ce qu'on appelle innovation (que ce soit en technologies ou en science, ou en art, etc.).

Relativité

Ce qui me dérange aussi dans l'idée de progrès linéaire moral, c'est le côté définitif aussi. Oui, il y a des moment où on ne peut plus retrouver l'état d'où l'on vient. Mais ce n'est jamais quelque chose de 100% sur et définitif. De surcroit, on a tendance à juger le "passé" en fonction de nos filtres présents et donc, on voit certains comportements comme extrêmement insupportables comme la violence de jadis. Mais c'est aussi peut être oublier qu'à focaliser sur ce qui nous choque rétrospectivement on oublie qu'il devait y avoir d'autres domaines où les humains d'alors étaient plus en avance et plus "raffinés" que nous. Je pense notamment au spirituel, ou à la non super grande spécialisation obligatoire dans le "travail". En cela, les dieux et Dieu ne sont peut être pas que des inventions et des mythes qu'on reléguerait de façon condescendante à du folklore, comme on relègue parfois tout ce qui tient à l'art à du folklore. Le progrès n'est donc pas être supérieur au passé, on est différent, notamment sur certains points spécifiques (qui il est vrai tendent à se propager à toutes les facettes de notre existence). Pour imager un peu la chose, de façon très géographique, quand on se rend à pied de chez soi à chez un ami, ce déplacement n'implique pas que le moi proche de chez l'ami soit supérieur au moi proche de chez moi, on est juste à deux endroits différents d'un même trajet entre deux lieux. Mais je "progresse" vers chez mon ami. Bref, lol je sais pas si ça va rendre plus clair pour tous le propos ! Je reviendrais sur le temps...

Gros muscle à l'ancienne vrai

Il est vrai qu'avec les objets technologiques on se comporte parfois comme des enfants gâtés, et des gens stupides. On expose sa voiture puissante comme on expose ses gros muscles en bombant le torse. Pourquoi pas, c'est sympa à faire, ça peut être marrant. Mais je pense qu'on pourrait envisager d'utiliser les technologie un peu plus de façon "spirituelle", au moins un peu. Il est vrai aussi qu'on surinvesti parfois les technologies. Par exemple, aujourd'hui on ne conçoit pas un "travail" sans être collé à un écran, et il est difficile aussi de concevoir de se "divertir" sans écran. C'est pas optimal et carrément négatif (en moyenne). Du coup, certaines personnes se font un point d'honneur à tout faire "à l'ancienne", à balancer tout le web en bloc, à balancer toutes les technologies, en mode décroissance tout ça. Bon, pourquoi pas hein, ça reste une sureté pour l'espèce de varier ses stratégies en fonction des risques.

Passage de vitesse

Du coup, quand on fait des prédictions/hypothèses sur notre potentiel futur, beaucoup ont l'impression qu'on leur promet un package clé en main et standard. Alors que non ! Tout n'est pas certains déjà. Ensuite, tout ne sera pas uniforme, on aura beaucoup de capacités et de variabilités, de diversité. Et dire par exemple qu'il est envisageable qu'on puisse vivre 200 ans n'est pas dire qu'on va tous vivre 200 ans obligatoirement. On raisonne ici en terme systémique, donc de moyenne. On parle des potentiels et non pas de chemin obligatoire. Il est vrai que parfois les progrès sont limités dans l'usage pas la proximité des uns et des autres, la trop grande densité notamment, et par la démocratisation féroce des outils. Si on peut être puissant, on l'est peut être moins quand on se compare aux autres, la comparaison est une négociation, c'est une question de répartition du droit, des "richesses" (ce qui est perçue comme richesse globalement, à un moment donné). Illustration parlante des voitures, où on peut faire des voitures surpuissantes, mais se déplacer à maximum 50 km/h en ville, et 110/130 sur autoroute (infrastructure créée délibérément pour la voiture). Mais cela est une question d'espace et de concentration. La preuve est qu'en avion, l'air à ces altitudes n'étant pas occupé par les habitations, et les constructions et les êtres vivants sous formes de gros organismes, on peut aller très vite sans problème. Dans la dimension informationnelle de nos existences on peut donc aller à la vitesse de nos capacités hybridées/couplées aux technologies, et donc on a moins de problèmes structurels liés à la densité, à la concentration.

La mobilité de notre appréhension

Restons sur les voitures, grande "obsession" contemporaine encore. Il est vrai aussi que nous ne sommes pas de bons conducteurs. La voiture augmente le risque de mort de façon inadmissible, et toutes les campagnes de "sécurité" ne sont pas inutiles mais elles ne pourront pas descendre en dessous d'un certain seuil d'accidents. Parce que la voiture augmente les risques de façon systémique, et nous n'avons pas spontanément tous la capacité de gérer les dimensions et les vitesses en dehors de notre corps. Certaines personnes sont même incapables d'appréhender leurs propres limites et capacités corporelles, donc les étendre à une voiture est fou, alors imaginez aux dimensions d'un paquebot, d'un porte containers pharaonique... Pourtant certaines personnes y arrivent. On a donc des limites liées à nos capacités intrinsèques, qui fait que certaines "extensions" ont des avantages parfois plus que mitigés.

Un problème aussi dans l'appréhension des capacités est l'idée qu'on doit tous à chaque instant être au maximum de l'utilisation. Non ! Rien qu'avec notre corps, on a des capacités folles, mais on ne développe pas tout, parfois on néglige carrément certaines possibilités, parce qu'on se concentre avec plaisir et enthousiasme sur une capacité. On peut (pas tous mais beaucoup) être bon en sport, en mathématiques, en littérature, en dessin, ça peut se développer contrairement à l'idée de "don" ou "je suis fait pour ça et pas autre chose". Alors certes il peut y avoir des dominantes et ce de façon spontanée qui ne demandent donc que peu ou moindre efforts. Mais on peut aussi se "réinventer", ou cultiver quelques nouveaux savoir-faire, savoir-être. La dynamique des "makers", et du DIY ne va faire que s'amplifier. Donc, mon propos ici est que effectivement tout le monde se retrouve avec un smartphone surpuissant dans la poche, et on ne peut évidemment pas tous exploiter correctement cet outil. Mais ce n'est pas le but non plus. On a une langue, on peut parler h24 tant qu'on a pas de crampe de langue, mais parler h24 n'est pas forcément quelque chose d'intéressant et de vraiment utile. Pourtant on ne va pas débrancher sa langue et se séparer de sa langue sous prétexte qu'elle ne nous sert que 2h sur 24.

Sur-réaction

Reconnaissons aussi que toute "technique" s'applique d'abord en local et donc crée des effets secondaires que l'on doit gérer ensuite. Certains anti-progrès rigolent (vert) de ça. Il est vrai que quand on a des applis débiles sur comment faire caca, ou qu'on met de l'électricité et de l'informatique sur des outils qui en l'état purement mécanique marchaient très très bien sans dépendance énergétique, il y a de quoi rire (jaune), ou s'arracher les cheveux, au choix. Je suis aussi persuadé qu'en médecine on fait énormément de bourdes et crée parfois/souvent plus de problèmes qu'autre chose. J'aime penser à ma petite expérience dans le trading en tant que hobby superficiel de curiosité, sans enjeux réel. Et bien je pouvais devenir fou à voir des courbes descendre ou monter. Un pic de vente sur une de mes valeurs ? Oh bordel, je suis foutu, il faut absolument que j'intervienne le plus vite possible. Mais en fait, non, c'est pas une bonne stratégie de base. Il y a des fluctuations et réagir ou sur-réagir à la première venue est une perte d'énergie colossale en plus d'être inutile. Et bien, je pense que c'est pareil concernant la santé : à sur-paniquer à partir d'un symptôme, on crée effectivement un stress qui n'existait pas, et on focalise notre attention sur ce symptôme et donc le renforce dans notre mental et quand on souhaite le traiter en urgence parfois on se coltine les effets secondaires qu'on doit traiter ensuite, etc. Mais ce phénomène de répercussion en chaine n'est pas spécifique à ce qu'on regroupe sous le terme de "technique" ou technologie. On peut l'observer dans la "nature" aussi parfaitement.

Déterminer le futur

Donc, essayer de dire "la technique c'est mal, ou bof", il conviendrait peut être plus de se renseigner sur quelle proportion cela peut s'avérer positif. Il faudrait donc faire un méga calcul couts/bénéfices, ce qui déjà est impossible, même avec des super collections de données et de calculateurs, AI, tout le tintouin. Ce qui impliquerait au passage un vision mécaniste de toute la vie, un simple exercice de gestion comptable existentiel. Mais ça ne s'arrête pas là. Il est encore impossible de juger du bien et du mal car il faudrait savoir à l'avance comment ça va se développer ensuite, si on fait un bilan maintenant. Donc, on ne peut qu'essayer de réfléchir de façon systémique en anticipant certaines dynamiques. Et une fois de plus si on réussit à savoir dans quelle proportion c'est négatif, il faudrait encore savoir si ce bilan négatif à l'instant T sera à jamais négatif. Ce qui me semble plutôt difficile ! C'est tout l'idée de l'exponentiel et du disruptif qu'on peut observer facilement à l'échelle de la lecture et de l'apprentissage, où une compréhension majeure s'opère en un déclic parfois là où on était prêt d'arrêter, d'abandonner. Je ne dis donc pas que c'est forcément positif en tout point, mais que ça ne peut pas non plus être négatif en tout point, et que donc la balance de jugement se fait en fonction de ses propres filtres souvent collés aux idées d'un passé idéalisé toujours en inertie à travers nous. 

L'amélioration qui diminue

Cependant, je conviens que tout n'est pas bon à améliorer. Parfois ce qu'on prend pour un non optimum est juste un passage dans un ensemble de facteurs qui dépassent notre compréhension ordinaire. Parfois il vaut mieux conserver un outil moyen, et ne jamais chercher à l'améliorer. Parce qu'à vouloir améliorer certaines choses on peut tout bêtement arriver à les gâter, à les détruire. Ce qui soit dit en passant n'est pas forcément un mal non plus. Mais quand on parle de progrès cela n'implique pas de tout améliorer en bloc, comme un gros package. C'est chacun qui améliore ou module ce qu'il veut/peut. Et cela ne veut pas dire rendre définitivement obsolètes certains procédés ou outils. Ce sont des sortes de "calculs" en cours, qui se font sur le tas, par l'expérience. Ainsi concernant la musique et ses supports. Le CD a remplacé le vinyle, mais aujourd'hui le vinyle fait son grand retour, pour plusieurs raisons probables (durabilité, qualité, convivialité, gestuelle, charme de l'écoute et de certaines "imperfections"...). Et il en est de même avec l'alimentation où on revient après le tout pharmaceutique ayant même été jusqu'à interdire l'herboristerie à des auto-"traitements" par les plantes au cas par cas. Et il en est de même avec le sport "santé" où on s'est rendu fou de sports stressants jusqu'à se rendre compte que faire un peu de sport comme de la musculation et de la marche est ce qui semble le plus efficace en fait que de s'époumoner 3h de courses à pied par jour. De même qu'il y a des limites, ce n'est pas au plus on mange, au plus on aura de l'énergie utilisable et utile, pertinente et durable.

L'information est une topologie

L'information est en partie la création d'une topologie spécifique sur laquelle on tend à évoluer de plus en plus. Certains disent à partir de ce constat que l'économie (sic) de l'information est infinie. Et bien, je dirais oui, il est vrai qu'en elle-même elle est potentiellement infinie. Cependant, pour chaque individu la portion d'informations traitables, digérables est limitée. Ce n'est pas proportionnel ! La quantité de livres lus ne fera pas systématiquement la qualité du traitement de l'information accumulée. Parfois, comme pour le sujet de l'acquisition de la maison au début de l'article, il y a des frais qui ne sont pas vus de suite, qu'on occulte, porté par la jouissance de l'effet court terme de cette nouvelle propriété. Donc certaines informations mettent du temps à digérer, voire ne sont bien jamais digérées. Certaines informations entrent en conflit avec d'autres et cela occupe une partie de notre mental (conscient et/ou inconscient) en nous perturbant donc en d'autres domaines. L'assimilation n'est pas parfaite à chaque fois. L'information n'est donc pas sans limite, elle est juste un état différent avec ses propres conditions physiques ou méta-physiques. D'ailleurs on commence à parler d'ingénierie de l'attention qui est un centra de pré--traitement de l'information. Avec les dérives des plateformes actuelles qui nous volent notre attention. Sinon, la question de l'infini, à l'échelle humaine individuelle, la terre est infinie pour nos jambes et nos yeux, jamais on pourra parcourir toute la surface. Donc l'information comme le purement matériel ne sont pas à opposer sur leur potentiel fini/infini. Je dirais que le matériel est autant infini en potentiel que le purement informationnel. Il y a d'ailleurs une continuité entre ces deux états qu'on distingue par mesure pratique de compréhension.

Appréciation plus personnelle

Ultimement, ce que je pense du "progrès" ? Bon, il semble y avoir un paquet de nœuds autour de notre conception ordinaire du temps. Linéarité temporelle et linéarité du progrès... J'ai déjà esquissé une poignée de suggestion, dans cet article, en relation au temps. Et je ferais un dossier plus fourni sur comment je "perçois" le temps dorénavant. Ce que je peux dire, en tout cas, est que les sujets/objets que l'on est, voit, mange, construit, touche, c'est à dire par exemple un arbre, un vélo, et Tartempion, valent pour eux-mêmes certes, mais aussi représentent une espèce d'agent de transformation, de modulation et donc toutes ces transformations représentent du temps. Quand on brule une buche on brule certes une partie du corps d'un arbre mais aussi le temps qu'il a mis pour pousser et former ce dont on utilise. Quand on lit un bouquin, on hybride partiellement sa pensée avec celle d'un autre, et on bénéficie du concentré d'un travail de probablement plusieurs années voire parfois une vie entière (sans compter la filiation depuis les débuts). Et il faut imaginer combien c'est un "gain" de temps potentiel énorme, et ce dans chaque domaine, imaginez ! Donc, dans cette cumulation de bénéfices marginales individu par individu, on aboutit à cumuler du temps en moins de temps. Oui... ça parait étrange mais c'est bien comme ça que ça se produit. Il y a une sorte de compression/distorsion, tout en résultant en une impression de vitesse.

Méta-archive !

Et tel que je le vois, on va effectivement dans une direction à une échelle massive. Pas une direction uniquement "spatiale" mais une direction de création ou passage dans une dimension "supérieure". Il faut voir, qu'on "archive" et augmente quasiment toute notre vie et la vie sur terre même. Dans notre "évolution" on embarque quantité d'animaux et de plantes qui eux aussi se voient "modulés". Ces animaux et plantes sont abrités, on sait les nourrir de façon plus optimale, plus adaptée, ils ont parfois des vêtements, des radiateurs, de la musique, de la compagnie, des lampes UV, des décorations, des ornements. Toutes les maisons sont scannées, photographiées, répertoriées. Bon, évidemment, tout n'est pas rose. Je ne veux pas discuter sur ces derniers propos point par point, je les utilise juste pour montrer la dynamique d'ensemble. Donc, on ne va pas dans le futur, on crée une dimension différente, on embarque une bibliothèque totale. Tout est de plus en plus hybride en biologie/matériau et information. Oui, on migre vers un état qui ressemble à de l'information. L'information n'est pas sans matière, évidemment, mais est une concentration en actions et rétroactions potentielles de cette matière. Pour moi, les pensées sont des êtres et on a déjà fusionné en partie avec eux, notamment avec le verbal. A vrai dire même à l'état biologique, on est tous des hybrides, des sortes de chimères, même si pour nous au quotidien c'est "normal". Donc, il y a a priori une forte chance pour qu'on s'hybride à nouveau avec ce qu'on appelle technologie. La théorie de l'évolution pointe que la "sélection naturelle" s'opère en priorité par succès reproductif. Et je pense qu'il est possible qu'on ne puisse pas tous s'hybrider, ni qu'il en serait souhaitable. Par contre on risque de voir des divergences fortes survenir parfois, avec donc des possibles "embranchements" de l'humain, des formes de spéciations, comme je le suggérais dans l'article sur les cosmologies transhumaines.

hybridation et unité

J'ai développé avant l'idée qu'on était tous des hybrides, que nous sommes des composites. En effet, ce qu'a besoin mon cerveau n'est pas la même chose que ce qu'à besoin mes reins, parfois même cela rentre en contradiction. Mais à travers ça, on a quand même une unité d'ensemble, et je dirais que c'est pareil avec l'esprit, qu'on prend pour unitaire mais qui est ramifié. Alors oui on a quelque chose d'unitaire, mais pas totalement, pas vraiment. Par exemple, je suis souvent conscient sous forme de pics, de prises de conscience que je ne peux penser en dehors des livres que j'ai lu, mais aussi en dehors de mon environnement, de mes habitudes, de ce que je mange, d'où je suis allé et où je vais. Il me semble possible que le progrès "existentiel" soit ou se rapproche de ce qu'on nomme conscience, et nous serions le support de la conscience.

Disruption

Mot magique : disruption. Le problème est qu'on utilise ce mot, qui représente un phénomène réel, très souvent à mauvais escient. On l'utilise de façon agressive pour casser des entreprises, des projets honnêtes et porteurs de sens. On l'utilise pour casser la tranquillité. Mais non, ce n'est pas la disruption ça. Parce que la disruption est un effet de convergence et pas une modalité d'action. Parce qu'à ce moment là la disruption est un vol, un viol portant un nom différent. La disruption est un effet qui se manifeste sans qu'on sache le faire délibérément. Et on ne peut donc en aucun cas attribuer le mérite à une action particulière, ni à une personne particulière, ni à une croyance (économisme) particulière. La disruption ne se provoque pas sur commande, c'est un bénéfice qui peut éventuellement arriver mais qui résulte d'un ensemble extrêmement complexe et ramifié de facteurs. Le modèle de "start-up" n'est en aucun cas plus apte à provoquer la disruption que d'autres actions, même des actions non organisées, non planifiées. Ce n'est donc pas corrélé à la quantité de monnaie, à la quantité d'heure de travail, mais à un vaste ensemble indéterminable. Par contre, oui, le progrès n'est pas dans la continuité du toujours plus. Pas vivre dans un studio, mais dans un château, pas manger 3000 calories par jour mais 8000, pas prendre un café de 5cl par jour mais 70 cl, pas lire 20 minutes mais 5h... Non ! Ce n'est pas proportionnel.  Donc, la disruption peut tout à fait être dans l'abandon de certains niveaux, dans l'ajustement, dans le moins. Le prix de l'ambition généralisée est énorme par exemple. Je pense aussi au domaine de la méditation, où ce n'est pas au plus de temps du médite au plus tu seras performant ou retirera des bénéfices personnels.

Le progrès se situerait donc plus dans les possibilités de modulation de... tout, que dans l'usage systématique et totalitaire de l'accumulation de changements. Ça n'implique pas d'aller en tout domaine plus vite, d'être dans une course, d'être en compétition totale et permanente, de perpétuer l'économisme, de s'agiter comme des forcenés, de produire pour produire, etc.
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self-génératif

1/3/2018

 

C'est quoi un "self-génératif" ?

C’est l’idée que nous sommes plus que les limites de notre corps. Le simple constat que notre mémoire, constituante majeure de ce qu’on appelle « moi », « soi », ou « identité », n’est plus réduit à la boite crânienne. Le tout cerveau ? D’accord, mais la mémoire du smartphone avec nos photos et les fichiers, conversations stockés est tout autant notre mémoire. Et notre mémoire est donc en partie collective, car tout passe par la « connexion ». Je défends ici l’idée que tout peut plus facilement et honnêtement être définit en terme d’interactions. De même nous ne sommes pas que nous, mais aussi nos relations sociales. Une part de nous est dans nos relations qu’on le veuille ou non, et inversement. L’individu n’est pas un isolat, une entité posée à partir de rien, et évoluant dans rien. Toutes les composantes de nos environnements nous constituent et nous modèlent, en permanence. Ne serait-ce qu’en microbiologie, nous voyons que nous sommes constitués d’un microbiome et plus encore nous serions un halobionte car il y a un complexe microbien intérieur et aussi extérieur. Dans le « nous » ou le « moi » il y a donc beaucoup d’entités supposées extérieures qui font en réalité entièrement partie de nous, autant biologiques que technologiques.

Le soi technologique

La part technologique est en pleine expansion dans nos identités, et ce n’est pas prêt de s’arrêter apriori. Dans le livre Réflexe Virtuel, on a mis en avant le fait que nous allons plonger vers de plus en plus d’environnement virtuel, l’environnement devenant part entière de la communication. Car jusqu’à lors on restreignait le langage aux mots, au verbe, mais nous revenons là-dessus en l’élargissant au langage corporel, situationnel par exemple. Étant donné nos divers comptes sur applis nous élargissons sans cesse nos identités. Tout ceci aboutit à ce que notre « identité » s’auto-génère. D’où l’expression self-génératif. Car il y a des effets d’emballements quasi-autonomes en ces supports virtuels. On se sent vite obligé de consulter régulièrement ceci et cela, d’ajouter tel contenu, de commenter, d’interagir. Les algorithmes nous modulent aussi tout en se modelant aussi eux-mêmes en retour et en parallèle.

inconscient

Pour le parallèle, l’inconscient est aussi devenu ces datas qui nous échappent, ces processus automatiques des algorithmes codés par autrui. La frontière qu’on s’imagine nette et précise d’un individu vole en éclat aussi bien biologiquement que technologiquement. Le problème central de ces conceptions ordinaires erronées est que nous pensons en terme d’élément ou produit finit. Nous sommes, dans un mouvement, voire un mouv tout court. D'ailleurs explorons un peu l'inconscient rapport à ce concept de self-génératif. Vous pouvez trouver quelques éléments de réflexion à ce sujet déjà dans un paragraphe de l'article Triméta. Il n'y a donc pas UN inconscient, tout est ramifié et aucunement unitaire. Ensuite, on se figure de façon territoriale qu'il y a un territoire inconscient. Non, les inconscients ne sont pas des territoires, ni à explorer, ni à conquérir. On a certainement en tête l'image de l'iceberg. Cette image est pratique dans un premier temps pour faire comprendre que la conscience est minime ni seule. Mais cette image devient vite embarrassante ensuite, car elle donne l'idée de proportion et donc de mesure de l'inconscience, ce qui est stupide. Sonder l'inconscient est une idée stupide. L'inconscient c'est - pour une analogie mécaniste - un processus automatique. Quelque part c'est un travail dont on n'a pas à s'occuper consciemment, ce qui est donc davantage réjouissant qu'angoissant. Bref, revenons au self-génératif.

Ah, encore un truc, on se figure, du fait que nous avons deux mots distincts que ce qui est appelé conscience et inconscient sont deux états très distincts. En réalité, il y a une continuité, c'est pas comme si la glace se transformait soudainement entièrement en nuage, pour reprendre l'analogie de l'iceberg. Il n'y a pas une frontière nette et précise. Et ce n'est pas parce que je fais des choses en étant éveillé que je fais ces choses vraiment en conscience. On peut tout à fait être inconscient debout, en plein jour, et en faisant mille choses à toute berzingue.

Schema bulle conscience et inconscient attention blog identité
Schéma sommaire pour illustrer. La grande bulle de l'inconscient à gauche. La surface de l'attention au centre. La bulle de la conscience à droite. Les boucles et fils intérieurs passent d'une bulle à l'autre et s’entremêlent, mettant en avant la continuité du phénomène. En vrai il s'agirait plus d'une grosse bulle avec l'attention qui sépare partiellement et offre alors une possibilité de transformation. Le schéma est figé mais en réalité les bulles varient de taille et de volume en permanence. Cependant il me semble intéressant de poser brièvement cette représentation ici.

Sentir l'identité par privation

La définition du soi apparait beaucoup plus souple et éparse qu'on se le figure sur une base habituelle. Par exemple, moi qui suis jardinier, je suis très attaché au bout de terre dont je m'occupe. Je ne suis pas que mon corps, je suis chaque plante, chaque parcelle de terre de ce jardin, et détruire ce jardin ne détruirait pas mon corps et mon intégrité certes, mais je serais vraiment comme amputé sévèrement. Vous savez c'est aussi les proches qui sont frappés par la mort, on peut se sentir vidé. Ou alors c'est si vous aviez construit quelque chose pendant longtemps avec énormément d'efforts et que tout est subitement détruit. Je pense notamment à ces écrits qui par une mauvaise manip ou un bug se sont volatilisés. Mais ça peut être une collection de photos, un vêtement, une maison, un travail, etc. J'ai déjà fait des jeûnes alimentaires (légers hein) et on se sent coupé au début, bordel c'est bon de manger. Et j'ai ressentis des émotions similaires en étant coupé des outils technologiques, à la connexion, aux informations s'y diffusant. Se faire voler son portable n'est pas qu'une question de perdre autant de monnaie, mais aussi un pan entier de son identité passé et de la possibilité de continuer à créer de cette forme d'identité. Quand on expulse une personne de chez elle, ce n'est pas qu'une personne définie par un corps et un vague concept de personne physique/morale, c'est tout un pan qu'on arrache, parfois définitivement.

Modulable ?

Si on continue l'analogie de l'iceberg, les processus fabriquant et stockant l'identité en sa composante numérique est un nouvel état de glace, peut être une glace émergée qu'on immerge délibérément, ou alors on agrandit la base immergée pour agrandir la partie émergée (Olala voyez qu'une analogie est pertinente sur une courte séquence et dès qu'on veut continuer plus loin sur cette analogie on rend la chose plus confuse qu'auparavant). Il en résulte que ces processus dont on s'occupe consciemment mais qu'on va de plus en plus déléguer aux fameux "algorithmes" peuvent nous donner des possibilités monstres. Tantôt on pourra rétrécir sa conscience en actionnant plus de processus automatiques qui s'auto-génèrent, mais aussi tantôt augmenter sa conscience à d'autres endroits, se redéfinir sur une tache précise, sur un pan de l'exploration spirituelle/existentielle. Il y a donc le péril de ne pas contrôler une part toujours plus importante de ses inconscients, donc plus loin de son conscient, d'être à la merci de malhonnêtetés, d'exploitations sournoises et politiques. Mais il y aussi la chance inouïe de pouvoir se concentrer sur des choses plus proches de nous, de nos réels intérêts existentiels. On peut donc à la fois s'en inquiéter et s'en réjouir, si on souhaite réfléchir aux conséquences de ce phénomène.

Vers une pré-méta-cognition

Si on peut choisir ses humeurs, ses capacités, ses souvenirs, ses connaissances, alors notre soi, notre acte d’existence se situe dans la gestion de ces choix. Ainsi, nous ne sommes plus dans l’action puis cognition rétrospective de cette action. Nous serons davantage dans la précognition, ce qui se traduit dans la prédiction, ou alors l’anticipation, ou la prospective. Mais, cet état est tributaire du mode action => récompense. Et la récompense peut être trop prenante, comme une souffrance d’ailleurs, et l’oubli survient. Ce qui retarde la revenue de la précognition suivante. A ce stade, le plus gros de notre travail consiste à se défaire des effets de la récompense. On confond usuellement notre identité, notre individualité avec ces effets de récompense en chaine. Dans cet état, il nous devient difficile d’appréhender une autre conception de l’identité et de l’individualité. La métacognition est grossièrement savoir ce qui est vrai et faux, bon ou mauvais même en faisant en acte autrement. Il y a dissociation, ou non association (totale ou partielle) entre l’acte et la métacognition, sur une base habituelle. Au plus on continu l’exercice de la précognition, sous un max de formes différentes, des plus rationnelles aux plus farfelues, puis au plus nous précisons nos moyens de choix de soi (humeurs, capacités, etc.) au plus nous nous dirigeons vers l’apparition d’une pré-métacognition où l’acte et la métacognition de cet acte correspondent (du moins, un peu plus). Que sont ces moyens de choix de soi ? Des raisonnements, des expositions aux émotions variées et prenantes (jusqu’à ruptures fréquentes), des améliorations physiques, des altérations par produits (supplémentation), par exemple. Cette pré-métacognition peut, de notre point de vu actuel ordinaire, passer paradoxalement pour une dissociation car à implication spontanée fortement diminuée par rapport à la norme. Bref.

L'état d'information

Pour moi, aujourd'hui, l'information n'est pas seulement une qualité qu'on met en avant, mais aussi une qualité qu'on expose donc agite, donc transforme. C'est donc un ajout. Le mot "information" peut d'ailleurs éclairer à ce sujet : in-formation. Qui peut vouloir dire en formation, ou dans la formation, ou en train de se former. Cela peut donc parfaitement désigner un processus actif (et en cours) de trans-formation. Notre identité se faisait beaucoup auparavant par l'environnement, donc les arbres, les minéraux, les animaux, les phénomènes météorologiques, etc. Puis on a eu un vaste ensemble d'objets et de constructions qui sont devenus nous en retour, par rétro-action. On a eu aussi des identités plus abstraites (rapport à la matière) : mythologies, chamanismes, etc. Et maintenant on a des identités qui sont de plus en plus à l'état informationnel. Alors les termes de "dématérialisation" sont souvent excessifs pour ne pas dire du grand n'importe quoi, mais il y a des mutations importantes en cours, du jamais vu. L'information n'est pas qu'une simple et bête simulation de l'esprit sur le réel matériel. C'est - attention retour à l'analogie - un nouveau territoire qui occupe du vide mais aussi chevauche le réel, le traverse et le modifie partiellement. On est donc nous même en train de muter partiellement dans un état d'information. Il est donc logique que nos identités mutent en ce sens elles aussi.

Quels impacts, concrètement ?

Concrètement, les interactions physiques directes vont changer radicalement et on le voit déjà aujourd'hui ce phénomène. La sociabilité, qui est une forme de communication établie récemment essentiellement sous forme verbale orale, va donc a priori en pâtir dans un premier temps, et possiblement à jamais. Je ne dirais pas qu'on ne sera plus du tout "social", juste que les modes de sociabilité seront tout a fait différents, sous d'autres formes que les conventions actuelles. Donc, comme toute mutation, on va focaliser sur ce qu'on pense perdre alors qu'on gagne énormément. On va pouvoir se réinventer fortement aussi, tant individuellement que collectivement. On le voit avec les identités sexuelles et de genre actuellement, mais aussi dans les "reconversions" professionnelles qui se multiplient jusqu'à dissoudre la convention de spécialisation au travail, et plus loin aussi la hiérarchie verticale stricte. Il est possible aussi que de plus en plus de gens passent le plus clair de leur temps à dialoguer avec leurs propres identités, comme je le fais avec mon blog par exemple, en proposant des liens entre articles, mais aussi en les modifiant/actualisant du mieux que je peux. Avec ce self-génératif, on va avoir de l'information "sur-mesure" (ce qui ne veut pas dire forcément tout comme on se l'imagine ou le voudrait), et donc on aura son propre univers, ses propres mythologies devenues plus interactives et rétroactives que l'inconscient à l'état de processus matériel biologique. On va naviguer dans son soi. Ce n'est pas à prendre pour un repli ou un déclin, je dirais même le contraire, sans non plus être béa et niais, car mon but n'est pas de vendre quoi que ce soit, mais simplement comme le dit le nom de ce blog : explorer et anticiper.

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Représenter le futur ?

4/12/2017

 

Intro - Précision

Qui dit transhumanisme dit anticipation. L’anticipation est un exercice périlleux, il y a une grande part d’irrationnel. Nous n’avons apriori pas un cerveau pour anticiper beaucoup, du moins pas à de grandes échelles, ni de façon massive. Les facteurs à prendre en compte changent en quasi permanence, et s’accroissent sans cesse, certains disparaissant même. Et nous ne sommes que notre propre référentiel du monde. Or, le monde ne tourne pas autour de nous, que ça nous plaise ou non. Donc, on ne peut pas exclure par avance des méthodes d’exploration et d’anticipation de l’existence.
 
Les représentations sont inhérentes à notre construction aussi bien individuelle, mentale, intellectuelle, émotionnelle, (tout ce que vous voulez), que collective. Cela peut passer par un objet, une œuvre picturale, graphique, sonore, culinaire, tactile, olfactive, etc. Que ce soit labellisé « art » ou « science » n’a aucune importance, l’esprit humain, sur une base commune globale, se contrefout de ces séparations arbitraires.

Dessin transhumanisme Quentin Sagot
Réalisation de Quentin Sagot >> https://quentinsagot.wordpress.com/

Représenter le transhumanisme ?


   Déjà, remarquons que nous avons des dominantes visuelles et auditives. Notre langage verbal est sonore et scriptural. Ici même nous sommes sur de l’écrit, donc du visuel avant tout. Et nous discutons de représentations visuelles avant tout : peintures, graphiques, dessins, BD, ciné, etc. Donc toute l’anticipation se fait par cet intermédiaire visuel. On le voit aujourd’hui avec la prédominance des écrans, des projections urbaines, cinématographiques, pédagogiques, réalité augmentée, et bientôt holographiques. Le son ? Et bien on ne va pas trouver de musique futuriste. Du moins, si, il y a toutes les musiques « électro » qui nous donnaient l’impression de vivre ou d’aller à grand pas dans le futur. Aujourd’hui, toute la musique passe par l’électronique, même les instruments classiques sont très souvent amplifiés par des outils électroniques. Mais le genre-spécifique électro d’origine est quasi qu’instrumental et très répétitif. Le synthé ! Alors on peut penser à Jean-Michel Jarre qui a poussé loin et avant tout le monde tout un univers sonore et… visuel. Des choses « abstraites ». Pas ou quasiment pas de verbal, ni de figuratif.
 
Retro futurisme dessin futur
Source Image >> https://one360.eu/blog/archives/24104
 
   Il apparait que nous n’avons aucune représentation purement transhumaniste. Il y a des thèmes futuristes, des thèmes dits  d’anticipation, mais rien d’unique et spécifiquement transhumaniste. Cela peut poser problème. Nous n’avons même pas de logo, à part le h+. Le h pour homme ou plutôt humain et le + pour l’augmentation, le supérieur. Avons-nous des codes couleurs ? Des formes spécifiques auxquelles nous identifier peu ou prou ? Le problème étant que dans le transhumanisme il y a une ambigüité. D’un côté nous sommes et devenons chaque jour toujours plus transhumain, parce que nous mutons, nos communications et productions mutent, notre environnement mute. Mais par transhumanisme nous entendons aussi un mouvement particulier qui revendique ces mutations, et les encourage, invite la majorité à s’y intéresser, à s’y investir. Ainsi les transhumains que nous sommes tous ne peuvent exclurent des pans entiers de représentations, au contraire on englobe toujours plus de diversité, allant du plus rudimentaire au plus sophistiqué, du plus ancestral au plus futuriste. Par contre, les transhumanistes sont impliqués dans un processus de revendication, ils peuvent (et doivent ?) se rassembler sous certains codes afin qu’ils puissent être identifiés, et s’identifier. Un logo, un drapeau, une mascotte, un avatar, bref, un ensemble de codes facilement identifiable. Cela peut paraitre basique, voire rétrograde, mais c’est le jeu des entités extra-individuelles. Et délibérément ne pas se positionner dans ces ensembles n’a rien d’original ni de pertinent. Il faut se positionner, en acceptant le jeu des codes.
 

Humour dessin caricature transhumanisme france AFT
Source Image >> https://www.sciencesetavenir.fr/sante/un-autre-transhumanisme-est-il-possible_19904
   Le transhumanisme donc. Quelles sont ses représentations ? Immédiatement nous vient en tête toutes ces SF (science-fiction). Nous baignons dans une culture fortement empreinte de SF. Cette SF est fortement dystopique à l’heure actuelle, comme cette caricature ci-dessus qui présente Terminator ! Il y a peut être eu un désenchantement envers la science en cours de route, car au début le futur suscitait beaucoup d’enthousiasme, on se dirigeait vers la perfection et le bonheur. Ainsi ses premiers dessins représentaient des centres-villes propres, colorés, bien organisés, très épurés tout en ayant des parties denses, tout le monde avec le sourire, individuellement et collectivement. Cela était les premiers jets et donc relativement niais, ou simplistes. Cependant, cela a fait rêver, fantasmer, suscité des vocations, de la création, etc. Certains disent que la science de la bombe atomique est responsable du désenchantement. Qu’importe. Il y eu ensuite un revirement assez drastique puisque la dystopie nous a fait coucou et on se la coltine encore massivement today. Alors oui, c’est jouissif parfois de tout casser, si ce n’est nous-mêmes en actes, au moins des personnages fictifs en images. Mais n’allons pas de suite sur le scénario. Restons sur la représentation, c'est-à-dire des instantanés figés à travers divers supports relativement durables.

Sémiotique logos

Logo AFT transhumanisme
Source image >> http://transhumanistes.com/
Sur le site de l’AFT on voit la couleur blanche dominante, signifiant la sérénité, l’abstraction, la pureté, l’infini, la paix. Et le logo contient du vert, signifiant la nature, la luxuriance, l’espoir, la santé. La forme d’ogive horizontale suggère un œil, symbolisant la « vision », donc avoir une vision d’avenir, voir ce qui est possible, aussi la position de l’observation, de l’attention. Autour il y a des volutes rappelant les formes de la nature sous sa forme végétale, symbole de prospérité, de luxuriance et de connaissance aussi, voire de sagesse dans certaines traditions. L’Art Nouveau par exemple.
Photo art nouveau escalier architecture intérieur
Source image >> http://blog.artsper.com/voir-plus-loin/lart-nouveau-lintroduction-du-sensible-lart/
 
Le logo de la Singularity University est également intéressant à décrypter. Au début il s’agissait d’un grand et relativement épais S dans une forme d’écusson. Le S rappelait un peu superman, en plus soft et moins romancé. Le S peut aussi symboliser le mouvement avec ses deux courbes. L’écusson reprenait les règles desarmoiries médiévales, faisant certainement écho aux armoiries des grandes et anciennes universités du pays. Montrer l’ancienneté peut toujours être utile tant que ça évoque la noblesse, et non l’obsolescence, la poussière. Pour contraster ces formes, le choix des couleurs était d’ailleurs pertinent : des couleurs pleines et vives.

Cependant, ce logo a évolué. Dorénavant il s’agit d’un logo plus abstrait. La lettre a été abandonnée, et on va vers plus de symétrie. L’idée de courbe, donc de mouvement est toujours là, même amplifié et multidirectionnel. Par contre, les couleurs sont plus soft. Du bleu marine et de l’orange principalement. Dans l’ensemble on pourrait dire qu’il s’agit d’une rosace géométrique constitué de points. Cela est intéressant, car on brise le cadre du blason, on dépasse l’écrit verbal en supprimant la lettre, on élargit le mouvement à toutes les directions, on devient plus abstrait et plus vaste, plus global. Ce n’est pas facile de changer de logo, car un logo constitue une identité, un repère pour les membres et pour tous. Seulement cette transition me semble réussie ici. Les points suggèrent qu’il y a des entités différentes s’articulant et fonctionnant ensemble pour former un grand mouvement, presque un vortex (singularity). Chaque entité est unique et singulière, mouvement respectant l’individualité donc, la spécificité de chaque chose.
Le maintenant traditionnel H+ ou h+ est parfois représenté dans un cercle, et parfois seul, parfois en majuscule et parfois en minuscule. Un blogueur anglophone transhumaniste a proposé un néo logo. Plutôt intéressant. On voit le H par pattern incomplet entre le + et un moins (-) mis à la vertical. Assez épuré donc. Avec l'idée de borne plus et moins, donc électricité, donc l'idée d'énergie, mais aussi le +&- des mathématiques, donc l'idée de rigueur positive, de science.

Fiction par le paysage

Revenons sur les représentations fictives. D’abord, nous passons souvent par le paysage. Et ce paysage est souvent urbain, très urbain. Donc, dans notre imaginaire, le futur sera forcément urbain. Or, ça peut ne pas être le cas. La concentration et densification de l'habitat sont des moyens primitifs de communication, l'architecture et l'urbanisme étant des technologies d'information aussi. Dans ces paysages urbains on distingue deux grandes tendances. D’un côté le paysage très technologique, très propre, très épuré, très organisé, plutôt lumineux. Et de l’autre, le paysage technologique sale, recomposé, réparé, inégal, sombre, peu coloré. De ce que je vois, globalement, il y a peu d’intermédiaire. Un clivage se dégage donc de cela. D’un côté une vision du contrôle structurel de l’espace public et des infrastructures. De l’autre, une vision du laisser-aller, du développement anarchique (connoté négativement) et inégal, dégénéré, parfois sur le modèle du bidonville (en plus "technique") vertical presque. Malgré ce clivage, il y a un point commun : la construction excessive dans la densité, des infrastructures lourdes et fixes.
Photo ville futur smart city
Source Image >> https://www.challenges.fr/economie/positive-economy-forum/la-ville-du-futur-au-c-ur-de-toutes-les-complexites_65265
Photo Film movie Irobot i robot
Source image >> Film I Robot
dessin BD ville futur sombre
Source Image >> http://poopss.centerblog.net/rub-villes-futuristes-.html


   Ce constat est basé sur la majorité et non la totalité des représentations. Bien entendu, il existe des représentations plus nuancées, où il y aurait des infrastructures humaines oui, mais très légères et/ou intégrées dans la « nature », faisant presque corps avec les arbres et les éléments. C’est le paysage écolo-futuriste. A contre-pied du tout-ville, vu précédemment, on a une base naturelle, essentiellement végétale, avec des touches de constructions humaine inorganique en dur. On a aussi l’intégration totale nature/construction avec des grandes tours serres. Dans les projections du futur on imagine donc d’abord son habitat, son environnement, et on y projette une extrapolation de ce qui (au présent) nous fascine, nous anime, nous dérange. Si la pub nous dérange, on va essayer de dénoncer cela en foutant des réclames extrêmement invasives partout dans la ville du futur. Si le trafic automobile nous dérange, on va le multiplier par 10k. Si la bureaucratie nous dérange, pareil. Donc, la représentation du futur passe souvent en priorité par l’environnement et notamment l’architecture, l’urbanisme. Ce n’est pas anodin. On veut savoir où on met les pieds avant d’envisager des actions. D’où l’environnement, dans lequel s’intégrer et agir.

Photo movie film Brazil bureaucratie
Source Image >> https://www.movieforums.com/reviews/1327084-brazil.html

Fiction par les objets

Ensuite on met en avant des objets et outils. Ils sont surtout technologiques. Des armes, comme les sabres laser, ou les fusils à « plasma ». Un skateboard volant. Une moto volante. Une voiture volante. Des téléphones. Donc tout un ensemble d’objets qui permettent de se déplacer dans cet environnement, d’interagir et communiquer dans cet environnement. L’outil : intermédiaire ou pont entre les individus et leur environnement. Parfois ces outils ont aussi une fonction symbolique, sociale, ou alors sentimentale, parfois alors même qu’ils sont obsolètes et directement inutiles. L’outil est une extension de nous, on ne peut donc pas attendre que tous les outils soient dénués d’humanité, qu’ils n’aient qu’une fonction bien précise et unique. Donc, les outils, dans l’anticipation et les représentations, constituent un moyen de symboliser l’action. Car sans outil il n’y aurait que des corps, et on ne peut alors que représenter des relations d’ordre sentimentales, l’amour de sujet à sujet. Dans l’imaginaire scientifique aussi d’ailleurs tout passe par des outils, des machines, sans cela on envisage peu ou pas de développement de connaissances. Mais ces outils ne sont pas toujours nécessaires et dans les fictions futuristes ils servent à symboliser le pouvoir technologique, et scientifique. Or, comme, plus avant, nous l’avons vu avec la ville, rien n’indique que les machines seront omniprésentes si toujours présentes dans le futur. Mais dans l’imaginaire, la machine c’est l’action, la puissance, la maitrise, le travail. Encore une fois, cette fameuse fonction symbolique dans les représentations.

Fiction par les habits

La mode ! Beh oui, nous dans nos idées on oubli qu’on met toujours des vêtements. Comment les artistes représentent le futur vestimentaire ? On pensera tous à l’exubérance du cinquième élément, par Jean Paul Gautier. Mais cette exubérance est récurrente. Surenchère de couches, de couleurs, de formes, de sophistications extrêmes. De l’autre côté, évidemment encore un clivage bien marqué, on a des uniformes bien lisses propres aux couleurs discrètes. Une partie est faite de tissus bien techniques et « futuristes », et une autre est au contraire un retour à des tissus simples, ancestraux, naturels (lin, cuir, corde…). A l’image du clivage urbain, dans une main on a la propreté impeccable et de l’autre la saleté, le seconde-main, la bricole, le rafistolage. Ce sujet est intriguant car jamais nous pensons que le transhumanisme puisse passer par le vêtement, reléguant cela de façon condescendante à du futile artistique, ou du tout juste « nécessaire ». Alors qu’il s’agit de seconde peau, comme les avatars sur le net sont un second visage, second discours. Tout ce qui est « extension » ou externalisation de fonctions du corps n’est pas « faux », ni forcément futile. L’habitation peut être vue comme une troisième peau d’ailleurs.

Photo film movie cinquième élément costume
Source Image >> https://i-d.vice.com/fr/article/43vn8q/10-films-science-fiction-mode
Photo sculpture cyberpunk costume habit futur
Source Image >> http://manchu-sf.blogspot.fr/

Les attributs comme symboles

Première étape d’observation, la représentation visuelle de notre futur humain se porte essentiellement sur les attributs (environnement, objets, vêtements). Tout ce qui est de l’ordre interne, intérieur n’est quasiment par représenté, ni (peut-être) représentable. A voir… Exemple, si un humain est radicalement changé dans son corps mais présente la même apparence extérieure, on ne peut guère savoir visuellement qu’il est « changé » ou « augmenté ». Les signes visuels sont insuffisants pour interpréter ou deviner quoi que ce soit de cet ordre. Voilà probablement pourquoi, on met souvent en scène des cyborgs avec des extensions forcément mécaniques très visibles. Voire des humains totalement mécanisés. On ne peut imaginer non plus un humain avec une forme radicalement différente de celle d’origine, actuelle.

La définition visuelle d’humain, pour qu’on puisse reconnaitre rapidement et sans trop de doute qu’il s’agit bien d’un humain, est cette forme et posture bipède debout. Dès maintenant, sans rien de technologique, ceux qui ne correspondent pas à ces critères font l’épreuve du traitement différent de la « norme », ce n’est pas intentionnel, c’est du pattern recognition comme on dit. On a besoin de se baser là-dessus pour créer des représentations. De ce fait, les représentations ne sont pas « idéales » (au sens surtout moral), ni forcément rigoureuses dans leur approche d’anticipation. Souvent nous ne faisons que reproduire ces biais et limites inhérentes à nos perceptions et mentalités. Et cette reproduction se fait souvent par exagération, car l’art est une forme de démonstration publique qui doit « parler » sans trop trop d’efforts, surtout quand il s’adresse à un grand nombre.

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Réalisation Quentin Sagot >> https://quentinsagot.wordpress.com/
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Source Image >> Source Image >> http://www.dccomics.com/comics/cyborg-2015/cyborg-1
Au delà de la "norme", donc, il y a aussi ceux qui n'ont pas choisi des "augmentations". Dans la fiction, par exemple, Stark est lourdement handicapé au niveau des organes internes (poumon, cœur) et il devient Iron Man avec ses augmentations techniques mi incorporées, mi externes. Mais dans la vraie vie, on a longtemps eu cette représentation des prothèses comme diminuant l'humain. Dorénavant on a un vision qui change radicalement, notamment avec des performances comme l'athlète Pistorius et ses lames. Alors, ce n'est plus une occasion de diminution dans les yeux de la majorité, mais ça devient une occasion de dépasser même la norme. Bien entendu, ce nouveau développement des représentations des handicaps n'est pas toujours réjouissant. C'est bien entendu parfois comme si on forçait les handicapés à devenir des super héros. En oubliant que leur but en tant qu'humain, comme n'importe qui d'autre n'est pas de jouer aux héros pour faire plaisir à un public, ou rassurer ou inspirer ses téléspectateurs. Il faut rappeler que ce n'est pas choisi, et pas souhaité, ni souhaitable. Voir cet article du blog Pousser des ailes. Alors on a aussi des représentations totalement assumées qui mettent carrément en avant un "handicap" dans une mise en scène reprenant des codes de science-fiction, comme la mannequin Viktoria Modesta.

politique à travers l'urbanisme

Revenons sur la représentation de l’espace public. Derrière ce qu’on pense simplement esthétisme se cache évidemment très souvent une vision politique, et/ou sociétale.

On voit ainsi des urbanismes totalitaires, très droits, rectilignes, froids, des bâtiments et routes de dimensions écrasantes. Dans ce délire on voit des mix de soviétisme, de temples et monuments antiques, dont égyptiens, et de style buildings phallus géants comme dans les centres « d’affaires » des grosses villes du monde. Des choses très géométriques, aux arrêtes tranchées, de grands alignements. Ceci est dans le but de montrer l’idée de puissance, de maitrise, de rigueur, de l’inflexibilité du pouvoir et des méthodes. Il y a ainsi souvent de grandes places très vastes, très ouvertes, dégagées, avec l’idée de propre, de clair et net, que le peuple passant se retrouve, malgré le nombre, minuscule dans cet espace, que les pouvoirs savent faire le vide quand il le faut. Dans l’aspect symbolique plus positif, ces grandes places sont aussi la liberté commune, le regroupement possible, l’organisation d’évènements de grande ampleur, des rencontres, des échanges, etc.

On voit aussi des urbanismes très très chargés, à la fois en vertical qu'en horizontal. Des complexes sous terre, ou alors des complexes agrégés en hauteur jusqu'à ne plus pouvoir apercevoir le sol. C'est le modèle d'agrégation spontané des villes qui se construisent en remixant l'ancien, le nouveau, différentes couches d'époques. La manière dont s'organise ce qu'on appelle les bidonvilles est éclairante à ce sujet. On considère dans cet optique que la ville du futur suivra ce même modèle d'agrégation, en plus structuré et technique certes. Derrière cette représentation peut se cacher l'idée de corruption ordinaire, voire systémique. La bidouille aussi. C'est la jungle urbaine garantissant un certain anonymat dans des échanges officieux, non ou très peu régulés. L'idée de surpopulation se glisse ici aussi. Une espèce d'anarchie propres aux marchands sauvages, tout fait d'arrangements, d'accords sous-terrains.

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Source Image >> https://www.cbr.com/district-9-sequel-neil-blomkamp/

Attention, des Aliens !

Quand on parle futur, il est rare qu'on n'arrive pas à un moment ou un autre à parler de communication avec l'espace, donc avec des aliens, des formes de vie extra-terrestre. Le problème souvent rencontré est la pauvreté de ces représentations. Dans plus de 90% des cas l'extra-terrestre sera bipède et humanoïde. Ah ah c'est très mauvais ! Mais comment représenter ces formes de vie ? Difficile parce que pour comprendre que c'est en vie, on est toujours dans un anthropocentrisme extrême. Récemment on voit que des gens se rendent compte que les vaches sont des êtres vivants, que les arbres aussi sont des êtres vivants. Mais si on est honnête, une forme de vie extra-terrestre n'a ni à avoir une forme humaine, ni animale, ni végétale, ni même visible. Une bactérie peut être extra-terrestre, rien de nouveau, mais comment représenter une bactérie alors que par définition on ne peut pas voir à l’œil nu ces formes de vie ? Pourtant, c'est ce qu'a essayé de faire le film Life-Origine-Inconnue.
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Sinon, on doit se taper des bipèdes petits avec des couleurs fluo, des poulpes gluantes sous scaphandres, et autres belles joyeuses absences d'originalité. Si on représente des "esprits", ou spectres, on tombe dans un genre différent qu'est l'horreur et le fantastique. Et même dans ces cas là, on a toujours un langage similaire oral/écrit qu'on doit juste traduire comme on traduit du mandarin en afrikaans. La représentation originale d'une communication nouvelle est le film Premier Contact. Bon, passons, vous savez ma passion pour le langage :). Ce sujet est intéressant dans notre thématique ici. Rencontrer l'autre, savoir déjà voir l'autre. D'une certaine façon, on s'est tellement coupé (par des murs) de l'environnement initial que voir des vaches IRL revient aujourd'hui à une rencontre du troisième type pour l'excédant d'urbains que nous sommes. Ah et dans ces représentations de rencontre avec l'alien on a souvent aussi une belle dichotomie gentil/méchant, coopération/prédation, etc. Hmm, quand on voit que certains de notre espèce ont encore du mal à comprendre unsexe différent, ou une teinte de peau différente, on peut imaginer qu'il ne faut pas en demander plus. Ok, déso pas déso pour le sarcasme gratuit ^^
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Michel-Ange revisité

Parfois on représente l’idée transhumaniste avec la fresque de Michel-Ange où Dieu approche son doigt (index), sauf que celle-ci est revisitée : d’un côté l’humain et de l’autre une machine humanoïde. De prime abord, la représentation figurative de Dieu sous forme humaine est déjà louche sur le principe, mais encore une fois c’est de l’ordre du symbolique visuel. De même qu’on anticipe avoir des grosses machines partout dans notre futur seulement pour figurer la puissance qu’on va développer, bien que réellement cela semble peu probable qu’il y aura plutôt miniaturisation, disparition ou plutôt effacement progressif. Cette fresque humain-humanoïde nous marque immédiatement, mais sur le fond cela véhicule un message plutôt ambigu. Est-ce que le but de ce que l’on entreprend aujourd’hui dans notre société est la rencontre humain-machine, comme ça l’était de la rencontre humain-dieu ? Cela est délicat, car c’est comme si l’on avait remplacé dieu par la machine, ou mis l’humain à la place de dieu et la machine à la place de dieu. Dans les deux cas, il y a l’idée de cette puissance, ou surpuissance, une hiérarchie existentielle. Alors les critiques envers le transhumanisme qui accusent de sentiment de toute puissance ou de projet de remplacement se voient d'une certaine façon légitimées par ce genre de représentation.
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Source Image >> https://applepoo.deviantart.com/art/Steampunk-Bonaparte-211113757

Steampunk

Le mouvement steampunk est très intéressant. Déjà il y a l’idée d’associer le punk au futur, alors que le punk balançait le slogan « no futur » à la face du monde. Véritable prouesse de métisser l’aspiration au futur et un mouvement qui s’en défiait très explicitement. Ensuite, l’idée de métissage est encore présent esthétiquement dans le steampunk, car il s’agit de mixer des éléments mécaniques éparses, souvent de récupération, et souvent aussi par pure fantaisie esthétique ou technique, à des éléments plus organiques, comme du cuir, des tissus végétaux, des plumes. Cela est très pertinent car illustre qu’une part de nos mécanismes est d’ordre purement esthétique et non seulement fonctionnel et utilitaire. Et d’autre part que nos anciennes « techniques » ne sont pas toujours obsolètes, loin de là. L’ancien et le futur se confondent, s’associent, se marient. Il y a aussi à travers ce steampunk un certain romantisme non glauque, un romantisme nouveau, plus positif, porté sur l’action ou l’enthousiasme dans l’avenir. Parce que le romantisme à la base est plutôt une vue négative sur la civilisation, sur le progrès, et une idéalisation de la « nature » (nature hors humain…). Alors, le fait de réconcilier toutes ces choses, de les convertir dans quelque chose de positif est assez admirable. Il y a en sous-jacent l’idée de maker aussi. Je fabrique mes propres outils, mes propres accessoires, mes propres vêtements et j’en suis fier. C’est aussi une chose qu’on peut voir dans le transhumanisme, l’optique où on va pouvoir assumer et personnaliser toujours plus nos propres vies à l’échelle individuelle. Se dégage encore l’idée de recyclage, car plutôt que dejeter et de se procurer tout le temps du neuf, on récupère ce qui existe déjà et était voué à… rien. Mais ce steampunk contient aussi un brin de rétrograde, une nostalgie par multi-références passées. Quelque part on peut reprocher ce manque d’imagination à cet esthétisme pseudo philosophie-de-vie. Bref, ça peut sentir la poussière.

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Source Image >> http://www.mobygames.com/game/jaguar-xj220

La machine, ce nouvel animal

Le symbolisme. Comme déjà dit, on utilise des outils/créations présentes en les extrapolant et en en faisant donc des symboles pour le futur. Avant on utilisait des animaux pour évoquer des qualités de puissance ou de sagesse, ou d’omniscience. Exemple celtique de l’ours puissant, et de l’omniscience divine du corbeau. Maintenant, il semble que l’on utilise des machines à la place des animaux symboliques/mystiques/sacrés. Cela n’est pas étonnant car dans l’utilisation de l’énergie la traction animale par exemple a été quasi totalement remplacée par des machines fonctionnant au pétrole et/ou à l’électricité. Rares ne sont pas les analogies non plus du soleil avec la puissance, et avec l’invention de l’électricité de voir une centrale électrique comme un soleil. La fusion et la fission nucléaire ont été vendu ici et là comme de telles promesses de puissances. Le Râ égyptien est une centrale nucléaire, ou une centrale solaire gigantesque. La horde de chevaux d’un seigneur est devenu 600 chevaux dans une seule voiture. La voiture est donc une démonstration symbolique de puissance avant d’être une utilité ou une fonction. C’est l’animal, la monture, une extension par attribut d’une personne. D’ailleurs nombres de marques reprennent carrément l’animal comme logo (dans le sport aussi). Le corbeau omniprésent signe des dieux dans l’Europe pré-chrétienne est remplacé par un système caméra centralisé, avec traçage GPS par des institutions de « sécurité », des entités qui sont partout et nulle part.

De réel à picto

Mais comme les outils technologiques se remplacent vite les uns après les autres, certaines formes devenues obsolètes sont dorénavant des symboles, des icônes. Exemple de la disquette qui n’est qu’une petite icône symbolisant la sauvegarde. Car oui la technologie tend à muter très très vite, et à s’effacer dans le volume spatial requis au début (miniaturisation). Du coup, la mutation rapide est aussi un signe de puissance, de dynamisme extrême qu’en tant qu’humain social on a vite fait de s’approprier. Il est possible que le smartphone, omniprésent dans nos sociétés aujourd’hui, devienne un simple emoji, comme la disquette. On voit la conversion de réel vers du picto. La silhouette d'une pomme croquée évoquera la marque éponyme. Le taureau fera penser à la bourse de Wall Street et à Lamborghini. Assez parlant d'ailleurs cet exemple, d'un côté on parle d'échange "virtuel" mondialisé ultra rapide et de l'autre de voitures ultra rapides aussi... On voit aussi avec les émoji que des fruits peuvent devenir des symboles de sexe. On ne va plus dire cul, mais afficher un émoji pêche. Voyez ces multiples confusions, conversions. C'est toujours des métaphores. Mais ce qu'on constate c'est la tendance à la virtualisation. A ce propos voir le livre Réflexe Virtuel qui retrace très bien ce phénomène. Qu'est-ce qui hoy est quelque chose de normale de notre quotidien et qui demain sera une simple icône ? ... à méditer.

Réflexe Virtuel
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Source image >> https://twitter.com/shintarokago/status/935594927710355456

Une publication partagée par Steffen Kraft Eco Designer (@iconeo) le 22 Nov. 2017 à 6h31 PST

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Artiste >> Uno Moralez

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