Déjà, mesurons à quel point tout ceci est une extrapolation folle. Un produit sort de laboratoire et il est supposé comestible, sain, et devant être la nouvelle norme à l'échelle planétaire. Ni plus ni moins que cela. Rien que cela, cette acceptation banale, molle ou enthousiaste de ce paradigme tenant du fantastique est extrêmement choquant. Le degré de soumission est impensable, au niveau des idées seulement.
Sur quoi repose cette soumission ? Le progressisme. La technologie est forcément bien. Toute innovation est bien par principe, et est définitive, et remplace tout ce qui avait avant elle. Même le biologique est une construction sociale qu'il faut donc déconstruire.
Autre incohérence. il y a la mode d'être contre "le grand capital", d'être contre les pesticides, le pouvoir des labos, de l'industrie pharmaceutique, la mode du consommer local, de tout faire soi-même. Et des gens soutiennent automatiquement cette pseudo innovation de pseudo substitut, sans y voir une once d'illogisme. Alors qu'il n'y a rien de plus diamétralement opposé. Le paradigme soutenant cet avis automatique est déjà bien ancré.
Aussi, il y a des gens qui sont contre le progressisme social, le lgbtqism, les délires de changement de sexe, et autres troubles identitaires superficiels. Et curieusement, ça ne les choquent pas plus que ça de dire qu'une cellule de viande clonée est une bonne chose. Par là, s'il faut le préciser, ils disent que la nature est une construction sociale.
Faut pas se leurrer, on dit qu'on veut imiter la viande, mais si ce phénomène s'impose (avant de s'effondrer), ça concernera tous les aliments, et toutes les boissons. Au passage, qu'est-ce qui nous empêchera de manger des cellules clonées de muscle humain ? Oui, nous pourrions manger la chair de célébrité. Cannibale, anthropophage. On pourrait même se manger nous-mêmes.
Encore une chose surprenante, même de la part de pseudo "rationalistes", est d'en plus de tous les problèmes cités auparavant, que cela tient d'une pensée magique. Cet aliment supposé est fabriqué à partir de rien ? Quelles ressources ? En quelle quantité ? Ressource renouvelable comme est "renouvelable" une race bovine et de l'herbe ? Un des arguments avancés est la déprise territoriale. Cela repose sur le présupposé que "la nature" est mieux sans l'humain. Chose étonnant pour des gens si prompt à sortir la carte "appel à la nature", ou dire que l'on romance la nature. La déprise agricole est déjà là, du moins en France et dans certaines autres régions du monde, mais parfois l'inverse aussi. La forêt augmente en surface, mais aussi les incendies (volatilité du stockage de carbone par la forêt). Et la biodiversité n'augmente pas pour autant.
Enfin, beaucoup ne semblent pas comprendre qu'il y a une différence entre une cellule clonée, copiée-collée, et réarrangée pour donner une forme voulue et un muscle entier sur une bête. C'est dramatique de ne pas piger cette différence, parce que c'est purement de la logique de base. C'est l'équivalent d'une ponction d'une phrase d'un livre qu'on recopierait autant de fois afin d'obtenir une forme approchante de notre idée de ce qu'est un livre. Un extrait. C'est comme voir que le sexe est purement pour le plaisir, et alors on peut comparer un gode à un homme entier car c'est la même forme, ou alors une forme plus performante encore (pour le plaisir sexuel seul). Voyez qu'il s'agit d'un bloc paradigmatique qui touche à tous les domaines, enfin surtout aux domaines essentiels de l'humain qu'est l'alimentation et la transmission de la vie. Cet aliment de synthèse est un jalon sur une OPA radicale sur la nature et l'humain. Marchandisation plus poussée de la nature et de l'humain. Extension du marché par abolition sournoise des tabous (protections). Pure ingénierie sociale à une échelle inédite.