un peu de sens, svp ! Aujourd'hui on semble voir de plus en plus de choses qui nous paraissent n'avoir aucun sens. Cela aussi bien dans les produits "culturels" dirons-nous tel les clips musicaux de Nicki Minaj par exemple, que dans les "informations" du monde et du voisinage ou proche. Ah pensons aux séries TV aussi comme Dirk Gently ou American Gods par exemple où plusieurs genres se mélangent allégrement. Et dans les "informations" ou les faits du monde humain contemporain on a par exemple les comportements de certains chefs d’États. Bref je vais pas donner une liste, il s'agit juste de pourvoir à une idée de ce qu'est cette tendance. En réaction au sentiment de manque ou absence de sens on peut parfois adopter une posture résignée de néo-nihilisme retro-conservateur, bref quelque chose de cet acabit. On peut parfois aussi adopter une posture opportune de se dire que puisque rien n'a de sens je fais des trucs sans me préoccuper du sens et des répercussions, ce qui est par exemple caractéristique aux rigidités du "travail" de je fais ce qu'on me demande et le reste basta. On peut aussi adopter une posture de créativité enthousiaste sans pareille, et une moultitude d'autres nuances de comportements changeants. Davantage d'informations En fait, comment ça se passe ? On évolue dans un monde humain où tout se démultiplie à galopante allure. On a jamais eu autant d'informations à produire/digérer tous les jours. Et dans cette immensité en expansion forcément on est confronté à des éléments qui a une autre époque n'auraient pas été connues donc on aurait pas eu de réaction (forme de traitement de l'information) à cet égard, pas de quoi comparer avec notre connu qui parce qu'il nous paraît connu nous paraît aussi plus cohérent. En réalité, notre familier est déjà une suite cumulée et compactée de grand mix. Notre corps paraît quelque chose de naturel mais en réalité c'est un organisme multi-hybride. Nous sommes déjà dès la base de notre existence une chimère. Mais attention, chimère n'est pas négatif, c'est au contraire plutôt symbole d'union et de partage, de mise en commun. Donc, face à un assemblage d'informations diverses on a de plus en plus de chances de ne pas trouver de sens immédiat, ni de sens tout court. Cohérent, ça tient la route On a aussi l'impression que tous ces amas d'éléments éparses ne sont pas cohérents. Par exemple au quotidien on boit un café qui a poussé en montagne dans des pays tels l’Éthiopie ou la Bolivie, avec du lait qui vient de Bretagne, des œufs qui viennent des Hauts-de-France. Plus tard dans la matinée on lira un texte écrit il y a 70 ans en Allemagne, puis deux phrases écrites sur une plateforme de micro-bloging depuis l'Inde en langue anglaise, on prendra son vélo dont l'aluminium du cadre et le caoutchouc des pneus proviennent de toute part du monde et acheminées et transformées ailleurs encore, on fera une transaction par un jeu administratif de monnaie passant par des terminaux internationaux, etc. On voit donc qu'au quotidien rares sont les éléments purement locaux, cela nous parait normal dans l'usage tant on ne se préoccupe peu de la provenance et que l'habitude fait la familiarité et donc cette fameuse impression de cohérence. On pourrait alors tout à fait se dire, dans un jugement esthétique que notre quotidien n'a pas de sens, ou n'a plus de sens. Mais comme je viens de l'écrire il s'agit d'un jugement esthétique dont les filtres proviennent de nos capacités de reconnaissances de phénomènes répétitifs. L'accélération des échanges augmente le décalage entre nos perceptions (et capacité de traitement, dont de reconnaissance) et les réalités. Tous à dada, c'est wouf ! Quelque part le libéralisme matériel mondial dépasse toutes les espérances des mouvements dadaïstes et surréalistes, de même que l'affranchissement des États par les grandes firmes par exemple dépasse les espérances de l'anarchisme politique. Il n'y a qu'à voir une brocante ou un magasin de type Action où des objets absurdes se côtoient de façon absurde. Exemple ordinaire de brocante : une pseudo statue d’Égypte antique super moche à côté d'un porte éponge métallique avec des oiseaux, à côté d'un album de Oui-oui, à côté d'un chapeau melon, etc.. Ah oui, donc le dada - petit topo - est un mouvement qui revendiquait l'affranchissement de tout souci de cohérence esthétique, surtout de cohérence dite intellectuelle, ou rationalisée. La posture est radicale, et si je comprends et partage une partie de cette pensée, elle me semble réactionnaire somme toute et donc je vous invite à lire mon article sur la critique du langage verbal par exemple. Dans la continuité, le surréalisme à l'heure du village planétaire est aussi partout, et sans être une posture de protestation ou de revendication de la part d'une minorité. Bien entendu, il y a toujours en parallèle un souci de cohérence esthétique/formelle qui nous amène ou nous ramène à une espèce d'uniformisation ou lissage. Avant de classer toute cette dynamique dans un jugement morale négatif, on peut aussi peindre celle-ci en nécessité d'équilibre pour maintient durable de la structure. Imaginez qu'à l'échelle du corps humain classique, un groupe qui pousse très loin une démarche mystique ou artistique ou financier pourrait être l'équivalent d'un agrandissement subite de la main qui triplerait de taille en une heure. Tandis que quand tout grandit en même temps ou presque cela ne pose pas (forcément) de problème car c'est relatif à la structure, à l'ensemble. Nouvelle donne, wéwé :p En réaction à cet accroissement accélérant, on pourrait se dire qu'on n'a pas besoin de continuer à participer à cette dynamique. Mais ce serait une posture vaine et je jugerais même incohérente envers elle-même :). Mais c'est génial, c'est la créativité même que de croiser des éléments qui n'avaient jusqu'à l'heure pas de lien apparent. Cela se décline en tous les domaines, comme des couples multi-culturels, de la cuisine avec des combinaisons toutes fraiches, toutes nouvelles et ravissantes, des études parfaitement transdisciplinaires, des mélanges d'art de science, etc. Ce qu'il faut retenir c'est que la majorité du WTF d'aujourd'hui sera très vite le classique/normal de demain. Le WTF établit en fait de nouveaux codes, ou remixe des codes pour faire naitre une nouvelle donne. Regardez, même dans un domaine qu'on pense bizarrement souvent comme un peu conservateur telle une bibliothèque il y a des livres vieux de millénaires qui côtoient tranquille des livres contemporains, des livres qui présentent des propos en apparence opposés genre "la vie c'est la guerre" à côté de "la vie c'est la paix" lol mais en vrai c'est ça et ça ne pose pas de problème véritable. De façon aussi très concrète, pour ceux qui "bricolent" aka construisent ou réparent des trucs en tout genre, il y a un décalage entre ce qu'on pense faire, ce qu'on a déjà fait et ce qu'on fait sur le moment car chaque situation est unique et des aléas mineurs ou majeurs peuvent se glisser dans nos plans et prévisions, même quand il s'agit de poncer un plancher ou de changer de poignet de porte. On pourrait alors émettre aussi un jugement esthétique et se dire que c'est pas cohérent ou pas "normal", mais si tout est normal... et anormal en même temps. Remixe tout ça Ah et donc, évidemment, tout ce qui tient à l'idée de pureté formelle dans le sens de persistance et invariance est mise à mal dans cette perspective. On a en effet toujours cette tendance à considérer les formes comme éternelles et acquises alors qu'elles sont une étape, un instantané, une partie d'un mouvement ou dynamique d'ensemble qui dépasse ses extraits un à un. C'est comme de dire qu'un film de 1h32 n'est en fait qu'une image alors qu'il y a 24 images par seconde ou plus ou une continuité. Si on reste sur cet exemple du film, il est intéressant de noter la linéarité du développement de la narration en images et sons. Imaginons qu'on coupe cette linéarité et qu'on place une scène de fin au début, et une scène du milieu à la fin par exemple, on pourrait alors avoir une tout autre émanation de sens à partir des mêmes éléments, simplement la réorganisation change les effets, dont les effets de perception. C'est de souvenir ce qu'avait fait le réalisateur de Spring breakers, Harmony Korine, par exemple. La liberté du remix donc et de l'exploration de nouvelles combinaisons :) !!! Ce qui n'est pas l'occasion de manquer de respect et de produire des choses malhonnêtes, évidemment. Il s'agit juste de faire et tester, expérimenter des choses qui peuvent parfois ne pas être comprises par la majorité voire par personne, pas même nous-mêmes, mais sans que ce soit l'objectif d'être hermétique de tout sens. Le but de toute production reste le partage, et un souci de "cohérence" peut être un passage, une partie nécessaire de tout échange. Respecter les spécificité de chacun, les sensibilités de chacun, sans non plus amputer outre mesure ses créations artistiques car ultimement on ne ferait plus rien si on devait en permanence ménager les patterns-recognition de Bébert et Kitty. Mais encore, sans "produire" il s'agit d'avoir une démarche qui questionne à quel point notre familier est déjà totalement composite et pas si parfaitement unitaire. Notre cerveau par exemple est composé selon notre grille de lecture actuelle de trois phases de développement évolutionnaires : reptilien, mammifère, humain (le néo-cortex). Nos légumes et nos jardins sont composés de plantes issues des quatre coins du mondes qui pourtant se côtoient parfaitement "naturellement" au quotidien. Cela peut s'avérer une démarche qui permet plus de compréhension et donc de respect de toutes les différences de l'existence.
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