Avance bourrique ! Le temps. Sens unique ? La métaphore est souvent la flèche. La flèche du temps, allant toujours vers l'avant. Vers... l'avant ? Oui on retrouve un vocabulaire très spatiale. Je m'explique : de l'avant par rapport à quoi ? Oui, il faut bien un référentiel pour ensuite dire derrière, devant, à côté, au dessus, etc. C'est relatif ! Alors oui on nous présente le temps non pas comme une "dimension" à part, mais une facette du domaine spatio-temporel, ou espace-temps. C'est à dire, tel que je le comprends, ce n'est pas un objet avec d'un côté l'espace et de l'autre le temps, mais bien un entrelacs. Oui ! le langage verbal distingue deux termes mais en réalité c'est autre chose. Exemple, il existe bien un mot pour main et un autre mot pour oreille, et pourtant les deux font partie de la même entité, le corps tout entier. temps versus espace ? Pourtant, dans les faits, on observe qu'on peut se déplacer dans l'espace, mais pas dans le temps (ou seulement en survivant dans le temps et donc seulement de façon unidirectionnelle vers l'avant). Je peux aller grâce à la locomotion de tous mon corps dont mes jambes mais aussi par différents outils comme le vélo ou le fauteuil roulant, le skate, le bus, etc. où je veux, et surtout faire des allers et retours ! Je peux aller d'un point A, exemple chez moi, à un point B, exemple à l'épicerie, et revenir au point A ensuite. Tandis qu'avec le temps je peux aller de A maintenant vers B plus tard. Mais je ne peux pas aller de B vers A ensuite. De cette expérience très concrète, on en a déduit que le temps et l'espace étaient bien deux dimensions très différentes. Cependant ce raisonnement par déduction ne tient pas vraiment. En effet, ce serait comme de dire que les oreilles ne savent pas marcher. Or, à ma connaissance nous utilisons nos oreilles pour entendre et pas pour nous déplacer dans l'espace. Lol, bref, on va reviendre sur c’te phénomène. Vous reprendrez bien une part ? Maintenant on va… Ah ! Le découpage du temps en trois parts (De meule de gouda ? De tarte à la rhubarbe ?). Le passé, le présent, le futur. Donc, dans cette vision linéaire monodirectionnelle du temps, on est au présent perpétuel et une fois passé, le présent n’est plus présent mais passé. Et le futur est un présent à venir. Hum, j’ai un problème avec ce découpage. Oui, généralement on part d’un temps comme si c’était un objet constant et uniforme. J’aime à rappeler les notions d’échelle et de référentiel. Chaque élément a son propre rythme, son propre temps. Bien sur, tous les éléments existants ne sont pas des isolats, et ils s’intègrent donc dans des ensembles qui les dépassent. Par exemple le temps terrestre est différent du temps d’un individu humain, mais cet individu est bien compris/inclus dans le temps terrestre. De ce fait, oui le temps terrestre est constant pour lui-même mais à l’intérieur de ce temps il y a d’autres temps. Ce qui explique les variations temporelles que l’on peut tous expérimenter au quotidien. Notre corps même comporte différents temps et cycles internes qui ne sont pas toujours synchrones entre eux. Si on avait faim en même temps qu’on était fatigué ça poserait problème car on ne peut pas manger en dormant a priori (oui d’accord, sauf mentalement, en rêve donc). Dans le langage verbal on n’a pas ou peu de moyen (du moins à ce que je sache en français) pour exprimer la simultanéité et la réciprocité. C’est le côté linéaire du langage verbal notamment qui nous induit en partie à percevoir de cette façon maladroite beaucoup de choses, dont le temps. Oui, voyez, il y a plein d’apparents paradoxes. On se donne la réplique Le temps est ce qui permet un processus de réplication/reproduction, et en même temps c’est la réplication qui entraine le temps. C’est plus de l’ordre d’un pliage interne, voire d’une résultante secondaire/connexe d’un pliage interne spécifique à l’univers terrestre. On sait par la science actuelle que le temps passe différemment en fonction de la densité, le temps est donc différent sur terre que sur Mars. Nous de façon très concrète, cela dépend sur quoi on indexe notre sensation de temps. Par exemple le cycle de rotation de la terre permet de découper en parcelle répétitive différents phénomènes en interne : 24h pour un jour, puis 8h de sommeil sur 24h, etc. Cela indexe notre temps. De même que l’ensemble des interactions indexent et varient le sentiment de temps. Ca peut être le travail à heure fixe déterminée, mais aussi une tradition annuelle en famille, ou un évènement culturel/politique international, etc. Représentations en question Si l’on doit représenter le temps, plutôt que la flèche, j’opterais pour une topologie de type surface qui se plierait par moment/endroit. Tout ce qui tient des nœuds/entrelacs symboliques anciens comme on le voit notamment chez les arts celtes, vikings et islamiques par exemple. Mais aussi les pliages dits origami. Alors chaque chose, chaque être, chaque élément serait comme une partie d’une surface géante où chacun et l’ensemble se plierait, comme une mosaïque mouvante sur un papier mouvant. N’oublions pas par exemple que le textile est un entrelacs de fils. Chaines de transmission Profitons de ce rappel concret au textile pour définir des réalités sociales du temps. Il y a l’expression « le temps c’est de l’argent ». Je serais prudent sur cette déclaration tonitruante. Néanmoins, elle peut donner matière à réflexion. En effet, une simple écharpe est un entrelacs de fils, disons du lin. Cet entrelacs a nécessité du temps d’apparition de l’espèce en ses traits distinctifs, du temps de pousse pour la plante et le cultivateur, puis du temps de récolte et traitement, puis du temps d’affinement de la matière, puis du temps de conception, puis du temps d’apprentissage de techniques, puis du temps de fabrication. Ainsi la simple écharpe ne représente pas qu’une écharpe à fonction de vêtement, mais du temps multiple. Tout ce qu’on a comme outil et information aujourd’hui provient de temps accumulés et compressés depuis les débuts de l’humanité, voire du vivant entier. L’article que vous êtes en train de lire, et que je suis en train d’écrire, est lui-même une accumulation-compression d’un vaste ensemble de réflexions, de lectures, d’évènements, de travail, etc. Mais sans même aller puiser dans les productions culturelles, quand on brûle une branche ou un tronc d’arbre on brûle aussi le temps qu’a mis l’arbre à grandir et à puiser des ressources ayant précédé son existence. Pliage, relief et ressenti Chaque existence ne s’inscrit pas uniquement sur une ligne monodirectionnelle, comme on se le figure par la traditionnelle flèche (ah recoupement intéressant avec le mot anglais flesh : chair). Chaque existence est un pliage pliant. L’origami est une des meilleures images-métaphores que je trouve sur l’instant, même si elle n’est qu’une image. Car en effet le temps n’est pas une surface plate, comme l’espace n’est pas une surface plate non plus. Si on prend la surface spatiale sur laquelle on marche sur terre, il y a des plaines, des crevasses, des montagnes, il y a donc une grande diversité de relief. Il en est de même du temps. J’en reviens donc à une idée que j’aime rappeler : la modulation. Chaque être et chaque objet est une modulation temporelle en soi, qu’importe ce que chaque individu fait ou ne fait pas. Bien entendu chaque action « plie » son temps de manière différente en fonction de ses propres ressources, ses conditions et son travail existentiel dirons-nous. Il y a souvent une négation de la variabilité du temps : on se réfère au temps officiel terrestre ou simplement de sa région temporelle. Exemple j’ai l’impression d’avoir plié 3h à faire ceci mais en fait selon l’horloge officielle cela ne fait qu’1h. L’erreur courante consiste à reléguer ces impressions à un vague ressenti qui ne correspondrait en rien à la « réalité ». Reconnaitre les variations de type « ressenti » ne constitue pas une négation du temps « commun ». De même, le temps « commun » ne doit pas être une négation du temps « ressenti ». Différence de référentiel, mais pas de réalité intrinsèque. Conversion topologique Il apparait possible donc que la conscience soit une forme particulière de modulation du temps. Il faut, je pense, considérer chaque personne et chaque entité (élément qu’on sépare/distingue selon des critères qu’on jugera bons/pertinents). Si on raisonne en termes de fonction, ou du moins de fonction partielle ou majoritaire, alors l’acte de manger est une conversion et donc modulation d’éléments en d’autres formes. La vache en broutant les herbes de la prairie converti cette ressource. Cet acte de conversion donne de l’énergie à la vache mais ne se réduit pas à cette recherche d’énergie seule. De même, chaque organe à l’intérieur de nous converti certains éléments en d’autres éléments, et on ne peut pas attendre du foie qu’il nous fasse marcher comme le font nos jambes. Alors chaque geste, chaque posture, chaque pensée, la conscience sont autant de modulateurs spatiotemporels. Tout le vivant est une topologie particulière, de même que toute l’humanité constitue une topologie d’ensemble en elle-même. Et c’est probablement une errance que de partir du principe perceptible par les organes sensoriels ordinaires que la discontinuité de la topologie humaine fait sa contingence matérielle en effets/actes. Il y tout un boulgi-boulga sur nos conceptions de l’existence. prospective tranquille :) Maintenant, oui, ici je tente souvent d'anticiper, de faire de la prospective, bref quelque part de poser et d'écrire ce qu'on appelle le futur. A ce propos on reproche fréquemment de faire de la prédiction ou tout simplement de la projection personnelle sur une topologie collective ! Mais ce qu'on identifie comme étant l'histoire est tout autant le lieu de projection subjective, de tentative de retournement à son avantage de quelques uns. Mais il est pourtant avéré que je descend du pharaon Akhenaton, et que je suis aussi dans le futur l'omniscient président de la fédération galactique. Plus sérieusement, on a nous humains une dominante historique et peu de compétence sur le futur. Nos divers processus de fixation informationnelle - autrement appelés mémoire et cognition - sont bel et bien configurés de la sorte. La fameuse "pattern recognition" a par défaut été cristallisé dans nos reconstitutions culturelles en dominante historique, mais je pense qu'on reconnait aussi des éléments à partir de ce qu'on appelle grossièrement imagination, c'est à dire un mix non local d'éléments dispersés dans l'espace-temps. Dans ce qu'on appelle l'inconscient, les notions de rigidité spatio-temporelle sont la plupart du temps absents, ou du moins non-nécessaires. Comme l'espace-temps est une topologie il n'y a aucune raison pour que le passé ait plus de pertinence ou d'action sur notre localité que le futur. Si on accorde du sérieux à la démarche d'étude de l'histoire on doit tout autant accorder du sérieux à la démarche d'étude du futur. Si on déprécie le futur on déprécie en même temps l'histoire. La prospective n'est pas un ensemble de promesses. On ancre des évènements et des états dans notre topologie verbale humaine dans une localité non présente et ensuite on affine. Sois présent, pardi ! On pourrait croire qu'il y ait une sorte de symétrie autour du présent, mais non pas vraiment. Le présent n'est pas le futur qui se converti en passé, c'est plutôt le passé et le futur qui sont convertis dans la topologie singulière qu'est le présent. Dans ce réajustement de représentation des dynamiques, le futur n'apparait donc plus comme une fuite "en avant", tout comme l'histoire n'apparait pas comme une fuite "en arrière". Mais attention, souvent on a tout un délire sur la suprématie du présent, une sorte de fausse sagesse moraliste qui nous enjoint à "être présent". Mais sous ces invectives bizarres il y a un appelle à la conformité locale, c'est à dire qu'on cherche par là à ce qu'on se synchronise sur des critères au moins socialement visibles/démonstratifs. Quand dans un groupe d'amis une personne ne va pas bien cela peut enrayer la dynamique du groupe au moins sur une soirée voire plus. Quand dans une relation amoureuse chaque individu est dans un développement peu raccord, il peut y avoir une mauvaise relation (et une finitude donc) alors qu'on se reconnait sur d'autres critères. Toujours dans un exemple de relation sociale humaine, des références culturelles communes peuvent créer une topologie locale spécifique permettant une connexion et un lien entre deux personnes. Si tu aimes la musique et le délire de Vladimir Cauchemar par exemple, on peut éventuellement avoir une connexion au moment où j'écris ce paragraphe du moins. Ce critère combiné à une passion pour les fleurs de pavots augmente encore les chances. Ainsi de suite. Bref, je continuerais plus tard sur notre rapport au présent. Pour vous remercier de votre lecture et aimable visite, je publie ces schémas illustratifs. Le schéma en bas à gauche représente le temps dans sa conception ordinaire où le présent est le centre qui converti le passé en futur et le futur en passé. Le schéma en haut à gauche représente une autre conception ou une nuance. Le disque noir est le fondement du référentiel qui par exemple peut être un individu. Les autres points sont d'autres éléments qui gravitent et s'organisent autour de ce disque et entre eux, ça peut être d'autres référentiels qui alors chevauchent en partie le référentiel premier. Le schéma en haut à droite représente les mêmes éléments que le schéma de gauche mais avec des composantes qui prennent le dessus sur le référentiel premier. Ça peut traduire des dynamiques où l'on est fortement dépendant de référentiels autres, ce qui alors détermine plus notre temporalité que nous-mêmes. + en cours de manifestation... :)
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